Vous êtes calme, vous voulez un voeu discret
Vous êtes calme, vous voulez un voeu discret,
Des secrets à mi-voix dans l’ombre et le silence,
Le coeur qui se répand plutôt qu’il ne s’élance,
Et ces timides, moins transis qu’il ne paraît.Vous accueillez d’un geste exquis telles pensées
Qui ne marchent qu’en ordre et font le moins de bruit.
Votre main, toujours prête à la chute du fruit,
Patiente avec l’arbre et s’abstient de poussées.Et si l’immense amour de vos commandements
Embrasse et presse tout en sa sollicitude,
Vos conseils vont dicter aux meilleurs et l’étude
Et le travail des plus humbles recueillements.Le pécheur, s’il prétend vous connaître et vous plaire,
Ô vous qui nous aimant si fort parliez si peu,
Doit et peut, à tout temps du jour comme en tout lieu,
Bien faire obscurément son devoir et se taire,Se taire pour le monde, un pur sénat de fous,
Se taire sur autrui, des âmes précieuses,
Car nous taire vous plaît, même aux heures pieuses,
Même à la mort, sinon devant le prêtre et vous.Donnez-leur le silence et l’amour du mystère,
Ô Dieu glorifieur du bien fait en secret,
À ces timides moins transis qu’il ne paraît,
Et l’horreur, et le pli des choses de la terre,Donnez-leur, ô mon Dieu, la résignation,
Toute forte douceur, l’ordre et l’intelligence,
Afin qu’au jour suprême ils gagnent l’indulgence
De l’Agneau formidable en la neuve Sion,Afin qu’ils puissent dire : » Au moins nous sûmes croire »
Et que l’Agneau terrible, ayant tout supputé,
Leur réponde : » Venez, vous avez mérité,
Pacifiques, ma paix, et douloureux, ma gloire. «
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Paul VERLAINE
Paul Marie Verlaine est un poète français, né à Metz le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896. Paul Verlaine est avant tout le poète des clairs-obscurs. L’emploi de rythmes impairs, d’assonances, de paysages en demi-teintes le confirment, rapprochant même, par exemple, l’univers des Romances sans paroles des plus... [Lire la suite]
Diable transformé en ermite
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Verlaine, un petit vieux discret,
À son comptoir boit en silence ;
Sa plume moins souvent s’élance,
Dans les salons il ne paraît.
N’ayant que fort peu de pensées,
Il ne fait pas beaucoup de bruit,
Son labeur est de peu de fruit,
Malgré de sévères poussées.
Il se tient au commandement,
Il attend la sollicitude ;
Il a renoncé à l’étude,
Il est dans le recueillement.
Ainsi, tout parvient à lui plaire,
Car il se contente de peu,
Il boit du vin dans tous les lieux
Où l’on lui permet de se taire.
Mais son coeur continue de croire
Qu’il n’a jamais démérité ;
Et dans sa taverne abrité,
Il cultive un lambeau de gloire.
Chêne-Poulpe
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Voici le chêne-poulpe, un monstre de douceur ;
Il déclame un sonnet dans sa langue charmante.
Je n’ai pas bien compris s’il parle d’une amante
Ou d’une tavernière, ou d’une bonne soeur.
Or, j’aime savourer sa parole endormante,
Sa danse ralentie et son rythme berceur.
Dans son langage obscur, il échappe aux censeurs,
Mais ne s’égare pas dans des discours qui mentent.
Amuseur des vieillards et des jeunes enfants,
Il parle de Roland et de son olifant ;
Sa voix est délicate et n’est jamais rugueuse.
Chêne-poulpe, copain, tenons-nous par la main,
Rêvons de poésie sans peur du lendemain,
Avançons sur les pas de nos muses fougueuses .