Poème 'Une femme sur un village' de ATOS

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Une femme sur un village

ATOS

Le pouvoir de l’image c’est de fixer de cette façon là. Plaquer le dos de cette femme sur un village. La robe est noire aussi noire que le bras de son ombre. Le drap est bleu. Bleu et blanc. Le ciel aussi est bleu et les murs du village sont blancs comme de la craie. Blanc peut être comme le visage de la femme. Ce visage qu’on ne voit pas. Mais qui regarde. Qui fixe le village comme l’image. On ne voit pas la femme mais en fait elle est l’image – toute entière.
Celle qu’on ne voit pas nous dit de regarder. Ce qu’elle regarde nous nous ne le saurons pas. Ce qu’elle pense. Ce qu’elle peut dire. Nous ne le saurons pas. Elle semble marcher fixement comme l’image qui avance à travers elle, cette femme qui avance vers le village et qui pourtant se rapproche de nous. Le village est vide et pourtant elle y est entièrement présente. Absorbée par ce qu’elle contemple. Et nous la suivons. Fixement nous la suivons. Pas un mot. Elle ne se retournera pas. Pas un signe. Le signe c’est elle. C’est son regard que nous ne voyons pas mais qui nous désigne, nous montre, alors que sur la photo nous n’y sommes pas. Mais nous avons pénétrée l’image, nous sommes passés en sa présence. Cette photo c’est toutes les images. Une image qui fixe notre intelligence et qui construit une présence. Dans ce lieu où nous ne sommes pas nous fixons une image. Une ombre, un ciel, un mur, le corps, le dos d’une femme, nous ne la connaissons pas. On ne cherche pas le nom du village, ni l’âge de la femme. Tout est fixé anonymement. Pourtant à cet instant nous comprenons que cette image est à présent la nôtre. Éternellement. Une femme, des cheveux noirs, une toile blanche, peut être des yeux bleus , c’est la femme du village celle de l’image, celle de la photo, toutes celles que nous croiserons demain. A jamais nous la connaissons. Il suffira qu’elle nous face signe. Même si les signes sont en désordre, peu importe, cette femme nous suivra.
C’est ça une image, cette photo là. L’instant que nous ne connaissons pas et qui pourtant quoiqu’il arrive, même si le village est détruit, même si la femme est partie, même si la photo se perd, quoiqu’il arrive à jamais restera. C’est fini, tout est construit. Nous sommes rendus à cette l’image.
C’est puissant une image, extrêmement efficace. La femme fixe , la photo existe,et le temps s’arrête sur ce qui de se passe. Un présent ininterrompu. L’image est, demeure. Toutes les photos sont nos villages. C’est important une image comme une adresse.Les murs sont blancs, les robes sont noires. Comme le dessin d’un village à la craie.

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