Un Matin
Dès le matin, par mes grand’routes coutumières
Qui traversent champs et vergers,
Je suis parti clair et léger,
Le corps enveloppé de vent et de lumière.Je vais, je ne sais où. Je vais, je suis heureux ;
C’est fête et joie en ma poitrine ;
Que m’importent droits et doctrines,
Le caillou sonne et luit sous mes talons poudreux ;Je marche avec l’orgueil d’aimer l’air et la terre,
D’être immense et d’être fou
Et de mêler le monde et tout
A cet enivrement de vie élémentaire.Oh ! les pas voyageurs et clairs des anciens dieux !
Je m’enfouis dans l’herbe sombre
Où les chênes versent leurs ombres
Et je baise les fleurs sur leurs bouches de feu.Les bras fluides et doux des rivières m’accueillent ;
Je me repose et je repars,
Avec mon guide : le hasard,
Par des sentiers sous bois dont je mâche les feuilles.Il me semble jusqu’à ce jour n’avoir vécu
Que pour mourir et non pour vivre :
Oh ! quels tombeaux creusent les livres
Et que de fronts armés y descendent vaincus !Dites, est-il vrai qu’hier il existât des choses,
Et que des yeux quotidiens
Aient regardé, avant les miens,
Se pavoiser les fruits et s’exalter les roses !Pour la première fois, je vois les vents vermeils
Briller dans la mer des branchages,
Mon âme humaine n’a point d’âge ;
Tout est jeune, tout est nouveau sous le soleil.J’aime mes yeux, mes bras, mes mains, ma chair, mon torse
Et mes cheveux amples et blonds
Et je voudrais, par mes poumons,
Boire l’espace entier pour en gonfler ma force.Oh ! ces marches à travers bois, plaines, fossés,
Où l’être chante et pleure et crie
Et se dépense avec furie
Et s’enivre de soi ainsi qu’un insensé !
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Émile VERHAEREN
Émile Adolphe Gustave Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d’Anvers, Belgique, le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est un poète belge flamand, d’expression française. Dans ses poèmes influencés par le symbolisme, où il pratique le vers libre, sa conscience sociale lui fait évoquer les grandes villes... [Lire la suite]
- J'ai cru à tout jamais notre joie engourdie
- Les Meules qui Brûlent
- Les Vêpres
- Sois-nous propice et consolante encor...
- Si d'autres fleurs décorent la maison
- Les Saints, les Morts, les Arbres et le Vent
- La glycine est fanée et morte est...
- L'Ombre est Lustrale et l'Aurore Irisée
- Lorsque ta main confie, un soir...
- Le clair jardin c'est la santé
Il est intéressant de comparer ce texte intégral, que je découvre ici, avec la version "raccourcie" mais ô combien passionnante et exaltante, retenue par les chanteurs Julos Beaucarne et Melaine Favennec.
La poésie a besoin d'être dite à voix haute, et le chant, la mélodie, peuvent sublimer le texte.
Que de fois je me fredonne " Joie de Vivre" grâce à ces mots mis en musique ! Le message y est évidemment plus "optimiste" (voire béat diront certain-e-s mais tant pis pour les "trop réalistes" : la poésie ne PEUT pas être leur affaire...) puisque les regrets exprimés par Verhaeren dans les strophes 6 et 7 sont effacés.
Mais la vigueur du message n'est pas perdue parce que la moitié du poème n'est pas prise en compte.
Sa signification est moins égocentrique dans la chanson ; il ne s'agit pas de s'enivrer de soi, mais du MONDE NATUREL qui nous entoure et doit nous subjuguer par sa beauté.
La réduction du texte correspond aussi aux usages de notre époque, mais rend , je crois, Verhaeren plus proche.
Soyez heureux !
(abcxyz)
Poeme de la transhumance...osmose entre le poete...et le monde enviironnant...Je prefere...
L'univers, régi par l'équation coutumière
Dont il ne sait point diverger,
Jongle avec ses photons légers
Qui forment pour nos yeux l'impalpable lumière.
Les poissons dans le flot des torrents sont heureux,
Les oiseaux gonflent leur poitrine ;
L'érudit trace sa doctrine,
Assis à son bureau dans son grenier poudreux.
La forêt s'illumine à des éclats d'un feu
Qui est le sceau des anciens dieux ;
Sur le paysage, il s'imprime.
Le poète est joyeux, il écrit comme un fou
Sur la nature et puis sur tout
Ce qui lui inspire des rimes.
J'apprécie Emile Verhaeven et je recherche la poésie que j'avais apprise à l'école . Voici les premiers vers :
Vous en souvenez-vous genêts de mon pays?
Des petits écoliers,au cheveux en broussaile...........
Ce serait peut-être "Souvenir"
Merci et à bientôt
C'est peut-être de François Fabié.