Sur le Livre des Amours de Pierre de Ronsard
Jadis plus d’un amant, aux jardins de Bourgueil,
A gravé plus d’un nom dans l’écorce qu’il ouvre,
Et plus d’un coeur, sous l’or des hauts plafonds du Louvre,
A l’éclair d’un sourire a tressailli d’orgueil.Qu’importe ? Rien n’a dit leur ivresse ou leur deuil.
Ils gisent tout entiers entre quatre ais de rouvre
Et nul n’a disputé, sous l’herbe qui les couvre,
Leur inerte poussière à l’oubli du cercueil.Tout meurt. Marie, Hélène et toi, fière Cassandre,
Vos beaux corps ne seraient qu’une insensible cendre
- Les roses et les lys n’ont pas de lendemain -Si Ronsard, sur la Seine ou sur la blonde Loire,
N’eût tressé pour vos fronts, d’une immortelle main,
Aux myrtes de l’Amour le laurier de la Gloire.
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José-Maria de HEREDIA
José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]
Mur du baron Cornegidouille
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Sire Cornegidouille, un baron plein d’orgueil,
Construisit un manoir en calcaire de Douvres
Où furent accrochés plus de tableaux qu’au Louvre,
Qu’il contemple en buvant son verre de Bourgueil.
Mais aucun visiteur ne franchira son seuil ;
Le beau portail de sable au grand jamais ne s’ouvre,
Aveugle est le grand mur qu’un emblème recouvre,
Aveugle est le logis, comme sont les cercueils.
À frapper au portail, qui pourrait condescendre ?
Ce serait affronter l’oracle de Cassandre,
Ce serait s’attirer d’inquiétants lendemains.
De ce baron tordu, nul ne saura l’histoire,
Nul ne chroniquera la lignée dérisoire,
Mais la cornegidouille amuse les humains.
Un Livre ésotérique
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Ce fut Jean le Rêveur, seigneur de Roquefeuil
Qui trouva ce bouquin chez un libraire, à Douvres
Et me le revendit, quand j’étais rue du Louvre ;
Il le fit à bas prix, cet homme sans orgueil.
Ce grimoire en latin me fit franchir le seuil
D’un monde qui à l’homme assez rarement s’ouvre
Et qui est déroutant pour ceux qui le découvrent,
Un peu comme le sont les Puces de Montreuil.
En un sombre inframonde il me sembla descendre,
Territoire où régnait le spectre de Cassandre ;
Mes yeux ne pouvaient plus quitter ce parchemin.
Maintenant je suis vieux, je n’en sais plus l’histoire,
Il me semble pourtant qu’elle était dérisoire,
Comme sont bien souvent les oeuvres des humains.