Sur le balcon
Toutes deux regardaient s’enfuir les hirondelles :
L’une pâle aux cheveux de jais, et l’autre blonde
Et rose, et leurs peignoirs légers de vieille blonde
Vaguement serpentaient, nuages, autour d’elles.Et toutes deux, avec des langueurs d’asphodèles,
Tandis qu’au ciel montait la lune molle et ronde,
Savouraient à longs traits l’émotion profonde
Du soir et le bonheur triste des coeurs fidèles,Telles, leurs bras pressant, moites, leurs tailles souples,
Couple étrange qui prend pitié des autres couples,
Telles, sur le balcon, rêvaient les jeunes femmes.Derrière elles, au fond du retrait riche et sombre,
Emphatique comme un trône de mélodrames
Et plein d’odeurs, le Lit, défait, s’ouvrait dans l’ombre.
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Paul VERLAINE
Paul Marie Verlaine est un poète français, né à Metz le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896. Paul Verlaine est avant tout le poète des clairs-obscurs. L’emploi de rythmes impairs, d’assonances, de paysages en demi-teintes le confirment, rapprochant même, par exemple, l’univers des Romances sans paroles des plus... [Lire la suite]
Une main de sinople
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Cette main ne veut pas saisir une hirondelle,
Mais bien des grains de blé, délectables et blonds,
En été, dans les champs, quand les jours sont bien longs ;
Elle en prend à foison, mais ce n’est pas pour elle.
Cette main ne veut pas cueillir les asphodèles,
Mais veut bien préparer des tranches de melon
Sur la terrasse verte où dansent les frelons ;
C’est ici que boiront quelques amis fidèles.
De ce corps déjà vieux, qui pourtant reste souple
Les deux paisibles mains forment un brave couple ;
Je contemple souvent leurs dix doigts au repos.
Elles sont au jardin, qui déjà devient sombre
Malgré le bel éclat des étoiles sans nombre ;
Les derniers invités tiennent de vains propos.
Encore une main de sinople
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D’un geste de la main saluant l’hirondelle,
L’ermite se repose, assis sur ses talons ;
Lui qui sait que ses jours ne seront plus très longs,
Il aime retrouver cette errante fidèle.
Sur l’habitant du ciel son âme prend modèle,
Car nous, pesants humains, en rêve nous volons ;
Le but inaccessible, au moins, nous le frôlons,
(C’est ce que pense aussi l’oiseau de la gadelle).
https://paysdepoesie.wordpress.com/2019/01/25/oiseau-de-la-gadelle/
Du chêne et du roseau nous admirons le couple,
Face à l’adversité, l’un raide et l’autre souple,
Puis ils se sont rejoints dans l’éternel repos.
Ma main écrit pour ceux dont les jours furent sombres,
Tels Verlaine et Rimbaud, dans leurs malheurs sans nombre ;
Mais de les imiter, ce n’est pas mon propos.