Sonnet romantique
Autrefois elle était fière, la belle Ida.
De sa gorge de lune et de son teint de rose.
Ce gongoriste fou, le marquis de Monrose,
Surnommait ses cheveux les jardins d’Armida.Mais le corbeau du temps de son bec la rida.
N’importe ! Elle sourit à son miroir morose,
Appelant sa pâleur de morte une chlorose,
Et son coeur est plus chaud qu’une olla-podrida.O folle, c’est en vain que tu comptes tes piastres.
Tes yeux sont des lampions et ne sont plus des astres.
Tu n’achèteras pas même un baiser de gueux.Pourtant si ton désir frénétique se cabre,
S’il te faut à tout prix un cavalier fougueux,
Tu pourras le trouver à la danse macabre.
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Jean RICHEPIN
Jean Richepin, né à Médéa (Algérie) le 4 février 1849 et mort à Paris le 12 décembre 1926, est un poète, romancier et auteur dramatique français. Ce poète turbulent, fils d’un médecin militaire originaire d’Ohis (Aisne), eut dans sa jeunesse une réputation de « fort en thème », ce qui lui permit de faire de... [Lire la suite]
Deux verts loups
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Dans ce jardin, parfois, survient la belle Ada ;
Elle sait comme moi la forme d’une rose.
Quand l’automnal hiver ces beaux endroits arrose,
Nous restons au salon, c’est notre concordat.
Mais le corbeau du temps qui ma face rida
Souvent me fit passer par son miroir morose ;
Amortissant le goût du vers et de la prose,
Il nous pourrit la vie, sans en avoir mandat.
Le nid de ce corbeau n’est pas sur mon cadastre.
Ses yeux ne comptent pas dans le nombre des astres ;
Il n’est pas délicat, c’est un corbeau rugueux.
Pourtant si son désir frénétique se cabre,
Il pourrait devenir un Cupidon fougueux ;
Ou bien, s’il le préfère, un grand Eros macabre.
Oiseau du temps
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Avec de grands penseurs, jadis, il bavarda,
Posant plusieurs questions sur le nom d’une rose;
Partageant leur dîner qu’un vin rustique arrose,
Ce disciple fidèle avec eux s’accorda.
Puis cet oiseau du temps fut instruit par Bouddha,
Lequel ne parle point, mais il n’est pas morose ;
L’enseignement sans mots, comment le mettre en prose?
De n’oser rien de tel cet oiseau décida.
Ensuite il entendit les mots de Zoroastre,
Les paroles de l’air et le discours des astres
Qu’un vieillard lui transmit en son patois rugueux.
Il lut un palimpseste auprès d’un candélabre
Qui jadis fut orné par un moine fougueux ;
Mais il n’y découvrit qu’une pensée macabre.
Licorne romantique
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J’aimais le cygne de Léda,
Je lui ai même offert des roses
J’aime les typhons qui arrosent
Le domaine du Grand Panda.
Je plaisante avec un Bouddha,
Aucun de nous deux n’est morose ;
Nous aimons commenter la prose
Du Maître Jacques Derrida.
À l’abri de tous les désastres
Je me réfugie sur un astre
Juste au-dessus de Périgueux.
Si, plus tard, mon corps se délabre,
Ou bien s’il devient moins fougueux,
J’allumerai trois candélabres.