Sonnet (Moi, je vis la vie à côté)
Moi, je vis la vie à côté,
Pleurant alors que c’est la fête.
Les gens disent : « Comme il est bête ! »
En somme, je suis mal coté.J’allume du feu dans l’été,
Dans l’usine je suis poète ;
Pour les pitres je fais la quête.
Qu’importe ! J’aime la beauté.Beauté des pays et des femmes,
Beauté des vers, beauté des flammes,
Beauté du bien, beauté du mal.J’ai trop étudié les choses ;
Le temps marche d’un pas normal :
Des roses, des roses, des roses !
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Charles CROS
Charles Cros, né à Fabrezan (Aude) le 1er octobre 1842, originaire d’une famille de Lagrasse (Aude) et mort à Paris le 9 août 1888, est un poète et inventeur français. Passionné de littérature et de sciences, il fut un temps, de 1860 à 1863, professeur de chimie à l’Institut parisien des Sourds-Muets, avant de se... [Lire la suite]
Voyage du gyrovague
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Marchant le long du bas-côté,
Découvrant la nature en fête,
Je croise des gens, puis des bêtes
Et des candidats-députés.
Dans dix jours, ce sera l’été,
Bonne saison pour les poètes ;
De nul trésor ne vais en quête,
Sinon d'une tendre beauté.
Dans la nuit, j'ai rêvé de femmes,
J'ai traduit le Livre des Flammes,
J'ai distingué le Bien du Mal.
Le jour, je ne fais pas grand-chose,
Je bois un coup, car c'est normal,
J'écris en vers, je parle en prose.
Saint Esthète
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Prenons-le par son bon côté,
Car il est gentil, Saint Esthète,
Il ne se prend jamais la tête,
Ce citoyen sans vanité.
Il parle avec les fleurs d’été,
Avec le Concombre-Poète,
Avec tous ceux qui sont en quête
De l’inexprimable Beauté.
Il trace des portraits de femmes
Dont le regard est une flamme ;
Il ne craint pas l’Ange du Mal.
Il goûte à la douceur des choses,
Comme fait un doux animal ;
Il prie en vers, il prie en prose.
Forteresse pyramidale
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Grise sur mes quatre côtés,
Je fus bénie par un prophète ;
Les architectes qui m’ont faite
N’en tirent point de vanité.
Gardant ma fraîcheur en été,
J’offre une plaisante retraite ;
Le froid, de même, je l’arrête,
D’ailleurs on te l’a raconté.
En mes murs réside une Dame,
Laquelle est pure et noble d’âme ;
Elle ne fit jamais le mal.
Elle a quatre fleurs qu’elle arrose
En un rituel baptismal,
La plus belle est appelée Rose.
Saint Archibald
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Je n’ai pas que des bons côtés,
Puisque mon âme est imparfaite ,
Comme le disait un prophète,
Tout en ce monde est vanité.
Je médite, hiver comme été,
En une paisible retraite ;
Peu de visiteurs s’y arrêtent,
Sur mes doigts je peux les compter.
Il s’agit parfois d’une Dame
Dont l’âme renferme une flamme ;
Elle me délivre du mal.
Ici d’elle parler je n’ose
Je suis discret, c’est bien normal,
Dans mes vers comme dans ma prose.