Sonnet à sir Bob
Chien de femme légère, braque anglais pur sang.
Beau chien, quand je te vois caresser ta maîtresse,
Je grogne malgré moi — pourquoi ? — Tu n’en sais rien.
— Ah ! c’est que moi — vois-tu — jamais je ne caresse,
Je n’ai pas de maîtresse, et… ne suis pas beau chien.— Bob ! Bob ! — Oh ! le fier nom à hurler d’allégresse !…
Si je m’appelais Bob…. Elle dit Bob si bien !…
Mais moi je ne suis pas pur sang. — Par maladresse,
On m’a fait braque aussi… mâtiné de chrétien.— Ô Bob ! nous changerons, à la métempsycose :
Prends mon sonnet, moi ta sonnette à faveur rose ;
Toi ma peau, moi ton poil — avec puces ou non….Et je serai sir Bob — Son seul amour fidèle !
Je mordrai les roquets, elle me mordrait, Elle !…
Et j’aurai le collier portant Son petit nom.Britisch channel. — 5 may.
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Tristan CORBIERE
Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière, né le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar à Morlaix (Finistère) et mort le 1er mars 1875 à Morlaix, est un poète français. Il est né de l’union d’Édouard Corbière et d’Angélique Aspasie Puyo que 33 ans séparent : à sa naissance, son père est âgé de... [Lire la suite]
Palais de gueules
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L’ogre a fait ce palais pour loger sa maîtresse ;
On y vit dans l’aisance, on n’y manque de rien.
En retour, le bel ogre espérait des caresses,
Mais la dame préfère en donner à son chien.
Or, ce brave animal est rempli d’allégresse ;
L’ogre n’est pas jaloux, c’est un homme de bien.
Puis, donner des leçons, ce serait maladresse,
Ce serait peu conforme à l’idéal chrétien.
Ce chien proviendrait-il d’une métempsycose ?
Prit-il, précédemment, l’aspect d’un flamant rose ?
Ah ! Peut-être que oui, et peut-être que non.
Un grand palais de rêve, un ogre, un chien fidèle,
Plusieurs muses voudraient autant de bien pour elles ;
Ou bien, des troubadours pour célébrer leur nom.
Chien sans collier
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Ce chien ne reconnaît ni maître ni maîtresse,
Il pourrait obéir mais ça ne lui dit rien ;
Cependant il veut bien accepter les caresses
Et se promène, sauf s’il fait un temps de chien.
Or, c’est ainsi qu’il mène une vie d’allégresse,
Accompagné d’humains qui le comprennent bien ;
Et puis, il ne commet jamais de maladresse,
Quand il n’est pas d’accord, sa colère il retient.
Il s’assoit au jardin pour admirer les roses,
Il reste sans rien faire, il songe à mille choses,
Si j’ouvre le portail, il ne dira pas non.
Sans qu’il ne soit soumis, l’animal est fidèle,
À certains points de vue, c’est un clébard modèle,
Ce poème aurait pu rendre honneur à son nom.
Chien de Dionysos
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De celui-ci, la vigne est la seule maîtresse,
Il y passe son temps, il n’y manque de rien ;
Observant les raisins que le soleil caresse,
C’est un gardien sévère, un philosophe, un chien.
Pour lui aussi le vin est source d’allégresse,
Il en a sa ration quand tout se passe bien ;
Il sert les vignerons sans nulle maladresse,
La leçon des flacons, toujours il la retient.
Il rêve dans l’aurore et dans le couchant rose,
Ce chien dont l’existence est une douce chose ;
Si je lui offre à boire, il ne dira pas non.
À ses amours d’antan Dionysos est fidèle,
Ce fidèle animal l’a choisi pour modèle,
Dont la mythologie ne nous dit pas le nom.
Main de Dionysos
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Une sage dryade est du dieu la maîtresse,
Depuis qu’il la fréquente, il vit de presque rien ;
Sa main jadis bien rude apprend quelques caresses,
Mais il s’inspire aussi de Diogène le Chien.
Le feuillage est empli de rires d’allégresse,
Il n’y a pas de mal à se faire du bien ;
Sa jeune amante excuse une ou deux maladresses,
Lui donnant des leçons que toujours il retient.
Ainsi, le dieu du vin peut voir la vie en rose,
Il devient plus courtois, disant de belles choses,
On le croyait vulgaire, il nous prouve que non.
Un immortel peut-il être toujours fidèle ?
Dionysos, sur ce point, cherche-t-il un modèle ?
De l’épouse de Zeus il invoque le nom.