Poème 'Sonnet à Mme Fanny A. P.' de Charles CROS dans 'Le coffret de santal'

Sonnet à Mme Fanny A. P.

Charles CROS
Recueil : "Le coffret de santal"

A Madame Fanny A. P

Pour le surnaturel éclat des cheveux blonds,
Pour la neige du cou, l’aurore de la bouche,
Je rêve une peinture où, frêle, chaque touche
Soit un sourire, prix d’efforts fervents et longs.

Le fond, ciel de septembre où le soleil se couche,
Serait de saphirs bleus, de rubis vermillons.
Ma palette serait l’aile des papillons
Et mes pinceaux des brins de huppe d’oiseau mouche.

Je graverais d’abord avec un diamant,
En traits fins, le sourcil, l’oeil, la joue et l’oreille,
Conque rose écoutant mes vers malignement.

Puis la poussière d’or et de nacre, pareille
Aux éclairs de l’émail, au velours du pastel,
Teinterait ce portrait, pâle auprès du réel.

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Commentaires

  1. Bel oiseau magique
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    Le bel oiseau magique, au plumage d’or blond,
    Écoute les propos d’une invisible bouche ;
    Il semble commenter les phrases qui le touchent
    En poussant des soupirs, tantôt courts, tantôt longs.

    Puis il prend son envol quand le soleil se couche ;
    Il plane longuement dans le ciel vermillon,
    Plus léger que ne sont jamais les papillons,
    Plus subtil, plus vivant, plus fin qu’un oiseau-mouche.

    Je le vois s’élancer dans le vent, vaillamment,
    Tel un preux d’autrefois, un héros de roman,
    J’entends sa belle voix qui charme mon oreille ;

    Je ne me lasse pas de ce chantre irréel,
    J’aime le crépuscule et ses tons de pastel,
    Je pense qu’il est temps d’ouvrir une bouteille.

  2. Ange photophore
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    Ce n’est point de l’Amour le petit ange blond ;
    Il ouvre rarement son invisible bouche.
    Chaque fois qu’il le fait, cependant, ça nous touche,
    Ces étranges discours qui ne sont pas très longs.

    Arborant deux flambeaux quand le soleil se couche,
    Il salue les démons dans le ciel vermillon
    (Il est vrai qu’à ses yeux, ce sont des papillons) ;
    Il bénit le moustique, il dit bonsoir aux mouches.

    Puis je le vois prier au temple, hardiment,
    Sans pouvoir deviner quels sont ses sentiments,
    Car le son de sa voix n’atteint pas mon oreille ;

    Je ne sais que penser de cet ange irréel
    Qui plane dans les airs en robe de pastel,
    Je ressens près de lui une paix nonpareille.

  3. Propos du serpent d’azur
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    Je n’ai pas rencontré le prince aux cheveux blonds,
    Je n’ai point vu le fruit qui met l’eau à la bouche ;
    Or, quand on me les dit, ces histoires me touchent,
    Ainsi que tes malheurs, petit soldat de plomb.

    De cet arbre en Eden ne reste que la souche,
    Les démons, tout autour, ont tracé leurs sillons ;
    Je vois danser Lilith, devenue papillon,
    Elle a choisi cela, plutôt qu’être une mouche.

    D’une reine je fus le chevalier servant,
    Avec qui je vécus des instants émouvants ;
    Je me croyais alors au Pays des Merveilles.

    Ce monde est éprouvant pour les simples mortels,
    Abel fut massacré au pied de son autel ;
    Le spectre de Caïn bien souvent se réveille.

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