Sonnet
Par les pays des soirs, au nord de ma tristesse,
Mous d’automne, le vent se pleure en de la pluie
Et m’angoisse soudain d’une nuée enfuie,
Avec un geste au loin d’âpre scélératesse.Est-ce la mort qu’annoncerait la prophétesse,
Au fond de ce grand ciel d’octobre où je m’ennuie
- Depuis quel temps ? – à suivre un vol d’oiseaux de suie
Tourner dans l’infini leur si même vitesse ?Attendre et craindre d’être ! Et voir, en attendant
Toujours le même rêve, en l’air moite et fondant,
Avec ces cormorans de deuil curver des lignes,Le soir, quand le pêcheur lassé de la douleur,
Celui dont la nuée interprète les signes,
Pêche de la rancune en les bas-fonds du coeur.
Poème préféré des membres
ecnaida a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Commentaires
Rédiger un commentaire
Émile VERHAEREN
Émile Adolphe Gustave Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d’Anvers, Belgique, le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est un poète belge flamand, d’expression française. Dans ses poèmes influencés par le symbolisme, où il pratique le vers libre, sa conscience sociale lui fait évoquer les grandes villes... [Lire la suite]
- J'ai cru à tout jamais notre joie engourdie
- Les Meules qui Brûlent
- Les Vêpres
- Sois-nous propice et consolante encor...
- Si d'autres fleurs décorent la maison
- La glycine est fanée et morte est...
- L'Ombre est Lustrale et l'Aurore Irisée
- Les Saints, les Morts, les Arbres et le Vent
- Lorsque ta main confie, un soir...
- Le clair jardin c'est la santé
"Attendre et craindre d’être ! "
Ça résume bien des angoisses.
La tristesse
n'engendre pas
la scélératesse.
Monstre affligé
----------
Je suis pourvu d’une âme où règne la tristesse,
Elle éprouve à loisir la noirceur de l’ennui ;
J’entrevois le bonheur, et voilà qu’il s’enfuit,
Voilà qu’il me trahit, dans sa scélératesse.
J’étais moins dépressif au temps de ma jeunesse,
J’avais de plaisants jours et de charmantes nuits ;
Ils se sont assombris, les rêves d’aujourd’hui,
Ce sont des cauchemars de la plus laide espèce.
Bientôt je serai mort ; que faire, en attendant ?
Rester au coin d’un feu qui n’est plus très ardent ?
Même du désespoir, je ne me sens pas digne.
Mais la fin de mes jours, c’est la fin des douleurs,
C’est le temps de tracer une dernière ligne
Et de pouvoir quitter cette vie sans valeur.