Poème 'Pierre musicale' de Victor SEGALEN dans 'Stèles (orientées)'

Pierre musicale

Victor SEGALEN
Recueil : "Stèles (orientées)"

Voici le lieu où ils se reconnurent, les amants amoureux de la flûte inégale ;

Voici la table où ils se réjouirent l’époux habile et la fille enivrée ;

Voici l’estrade où ils s’aimaient par les tons essentiels,

Au travers du métal des cloches, de la peau dure des silex tintants,

À travers les cheveux du luth, dans la rumeur des tambours, sur le dos du tigre de bois creux,

Parmi l’enchantement des paons au cri clair, des grues à l’appel bref, du phénix au parler inouï.

Voici le faîte du palais sonnant que Mou-Koung, le père, dressa pour eux comme un socle,

Et voilà, — d’un envol plus suave que phénix, oiselles et paons, — voilà l’espace où ils ont pris essor.

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Qu’on me touche : toutes ces voix vivent dans ma pierre musicale.

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Commentaires

  1. Harpe d'or
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    La note de la harpe est la voix du griffon
    Qui danse dans l'azur, sous l'effet de l'ivresse ;
    La note de la harpe est le chant d'allégresse
    Du loup prenant sa course en des steppes sans fond.

    Les cordes, sous les mains, sans faiblesse résonnent,
    La musique survient, la vie prend son essor ;
    Ce n'est plus le moment de craindre un mauvais sort,
    Disent les animaux, que plus rien n'emprisonne.

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