Peut-être
Peut-être
Lorsque mon dernier jour viendra,
Peut-être
Qu’à ma fenêtre,
Ne fût-ce qu’un instant,
Un soleil frêle et tremblotant
Se penchera.Mes mains alors, mes pauvres mains décolorées
Seront quand même encore par sa gloire dorées ;
Il glissera son baiser lent, clair et profond
Une dernière fois, sur ma bouche et mon front,
Et les fleurs de mes yeux, pâles, mais encore fières
Avant de se fermer lui rendront sa lumière.Soleil, ai-je adoré ta force et ta clarté !
Mon art torride et doux, de son geste suprême,
T’a retenu captif au coeur de mes poèmes ;
Comme un champ de blé mûr qui houle au vent d’été,
Telle page t’anime et t’exalte en mes livres,
Ô toi, soleil qui fais éclore et qui délivres,
Ô toi, l’immense ami dont l’orgueil a besoin,
Fais qu’à cette heure grave, impérieuse et neuve
Où mon vieux coeur humain sera lourd sous l’épreuve,
Tu sois encore son visiteur et son témoin.
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Émile VERHAEREN
Émile Adolphe Gustave Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d’Anvers, Belgique, le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est un poète belge flamand, d’expression française. Dans ses poèmes influencés par le symbolisme, où il pratique le vers libre, sa conscience sociale lui fait évoquer les grandes villes... [Lire la suite]
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Un jour viendra la mort, et mon temps prendra fin,
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Dirai mon dernier vers si la muse m'inspire,
Un dernier jeu de mots, peut-être pas bien fin.
*
Ne plus sentir la soif ni éprouver la faim,
Ni craindre que mon sort évolue vers le pire,
Et savoir que le mal n'a plus sur moi d'empire,
Tout ça donne à la mort un céleste parfum.
*
A chaque instant ce sont foules de gens qui meurent.
D'eux ni de leur action, souvent, rien ne demeure,
Même si leur départ est noble et solennel.
*
Que sommes-nous, sinon un remous transitoire,
Goutte d'eau dans la mer, virgule dans l'Histoire,
Aucun de nous ne peut se prétendre éternel.