Pénitentes espagnoles
Le repentir songeur n’use plus leurs genoux.
Parmi les champs malsains et les villes malades
Elles dansent, ainsi que de noires Ménades.
Parfois le vent du soir éteint leurs cierges roux.Elles ont coupé leurs chevelures altières ;
Le cilice a mordu leurs seins endoloris
Leurs psaumes, soupirés ou jetés à grands cris,
S’accompagnent du son rauque des grelottières.Pourtant, il dort au fond de leurs yeux espagnols
Des souvenirs qui sont comme un jardin mauresque
Où le jet d’eau retrace une blanche arabesque,
Où s’exaltent les voix de mille rossignols.Et c’est en vain que ces lascives pénitentes
Lancent publiquement leurs clameurs de remords…
Jusqu’au jour où les vers rongeront leurs yeux morts,
Leur chair n’oubliera pas ses langueurs consentantes.Leurs flancs meurtris sont prêts encore aux pâmoisons,
Et leur bouche d’amante ouvre sa rose tiède,
Car le vent de Grenade et le vent de Tolède
Mêlent leurs sourds parfums au bruit des oraisons.Elles ne verront point, de leurs yeux de fiévreuses,
Le ciel où l’on n’a plus de souvenirs d’amour,
D’où, froide en sa blancheur, l’éternité du jour
Chasse les voluptés aux ferveurs ténébreuses.Elles n’entreront point au ciel limpide et clair,
Mais, dans la nuit ardente où pleurent les damnées,
L’amour, ressuscitant du tombeau des années,
Saura leur alléger les tourments de l’enfer.
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Renée VIVIEN
Renée Vivien, née Pauline Mary Tarn le 11 juin 1877 à Londres et morte le 18 novembre 1909 à Paris, surnommée « Sapho 1900 », est une poétesse britannique de langue française du courant parnassien de la Belle Époque. Renée Vivien était la fille d’une mère américaine et d’un père britannique fortuné qui mourut en 1886,... [Lire la suite]
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