Ô forme que les mains
O forme que les mains ne sauraient retenir !
Comme au ciel l’élusif arc-en-ciel s’évapore,
Ton sourire, en fuyant, laisse plus vide encore
Le cœur endolori d’un trop doux souvenir.Ton caprice lassé, comment le rajeunir,
Afin qu’il refleurisse aux fraîcheurs d’une aurore ?
Quels mots te murmurer, et quel lys faire éclore
Pour enchanter l’ennui de l’heure et du loisir ?De quels baisers charmer la langueur de ton âme,
Afin qu’exaspéré d’extase, pleure et pâme
Ton être suppliant, avide et contenté ?De quels rythmes d’amour, de quel fervent poème
Honorer dignement Celle dont la beauté
Porte au front le Désir ainsi qu’un diadème ?
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Renée VIVIEN
Renée Vivien, née Pauline Mary Tarn le 11 juin 1877 à Londres et morte le 18 novembre 1909 à Paris, surnommée « Sapho 1900 », est une poétesse britannique de langue française du courant parnassien de la Belle Époque. Renée Vivien était la fille d’une mère américaine et d’un père britannique fortuné qui mourut en 1886,... [Lire la suite]
Porteur d’étendard
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Les Barbares du Nord, comment les retenir ?
L’impériale vertu se perd et s’évapore,
Nul ne peut discerner ce qu’il en reste encore ;
La Grande Hégémonie n’est plus qu’un souvenir.
Notre vieux souverain ne saurait rajeunir,
Puisque son crépuscule est loin de son aurore ;
D’un arbre presque mort il ne peut rien éclore,
Sa Noble Majesté n’a plus que des loisirs.
Notre étendard conserve un fragment de son âme,
Un souvenir aussi du fier porteur de lame
Qui des ardents combats revenait contenté.
On y trouve un seul mot, qui vaut plus qu’un poème,
Plus qu’une concubine à l’étrange beauté
Et plus que le blason chargé d’un chrysanthème.
Ambidolmen
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Je suis un monument, ma devise est « Tenir ».
La pierre peut durer, le reste s’évapore ;
Le beau chalet de bois qu’un primate élabore
Au bout de vingt mille ans n’est plus qu’un souvenir.
La roche se patine et semble rajeunir,
Un peu plus au couchant, un peu plus à l’aurore ;
Loin d’être un matériau qu’un termite perfore,
Le témoin minéral se maintient à loisir.
Rien ne peut égaler la force de mon âme,
Sauf peut-être l’amour dans le coeur d’une dame ;
Ma vertu principale est ma stabilité.
Je suis un mégalithe, un aimable poème,
Les gens de ce village admirent ma beauté ;
Ils viennent chaque année m’offrir des chrysanthèmes.
Livreur de dolmens
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Voyez ce triptyque
Trois fois plus beau qu'un menhir
Et trois fois plus cher !
Les deux mains du Créateur
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Entre les mains de Dieu, qui donc peut se tenir ?
Plus rien n’est à saisir quand l’âme s’évapore ;
Du posthume sermon que le prêtre élabore
Tu ne verras jamais un miracle advenir.
Que penser d’un vieillard qui voudrait rajeunir ?
Oublie-t-il que nos vies n’ont qu’une seule aurore ?
L’éternelle survie n’est qu’une métaphore,
Au tombeau va le corps, ce n’est pas pour dormir.
Entre ses mains, dis-tu, je remettrai mon âme ;
Mais d’un feu bien éteint nul ne garde la flamme,
Plus ne peut un défunt son latin réciter.
Cet « In manus tuas », ce fragment de poème,
Je ne me lasse point d’admirer sa beauté
Quand je viens méditer parmi les chrysanthèmes.
Saint Bioz
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Je suis fort, j’ai de qui tenir,
Mon père fut céphalophore ;
De ce jour-là, je garde encore
De fort émouvants souvenirs.
C’est Dieu qui, pour nous affermir,
Quelques épreuves élabore ;
Il peut, comme le fit Pandore,
Un lot de tourments nous offrir.
À lui s’en remettent nos âmes ;
Craignant d’inframonde la flamme,
Désirant la félicité.
Une prière est un poème
Dont la force est dans sa beauté ;
Le Créateur aime qu’on l’aime.