Novembre
Jours de deuil ! plus de nids sous le feuillage vert ;
Les chantres de l’été désertent nos bocages ;
On n’entend que le cri de l’oiseau dans les cages,
Avec les coups de bec sonores du pivert.De jaunissants débris le gazon s’est couvert ;
Les grands bœufs tristement reviennent des pacages ;
Et la sarcelle brune, au bord des marécages,
Prend son essor pour fuir l’approche de l’hiver.Aux arbres dépouillés la brise se lamente ;
À l’horizon blafard, l’aile de la tourmente
Fouette et chasse vers nous d’immenses oiseaux gris…Des passants tout en noir gagnent le cimetière ;
Suivons-les, et donnons notre pensée entière,
Pour un instant, à ceux que la mort nous a pris.(1878)
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Louis-Honoré FRÉCHETTE
Louis-Honoré Fréchette (16 novembre 1839 – 31 mai 1908), poète, dramaturge, écrivain et homme politique, est né à St-Joseph-de-la-Pointe-Lévy (Lévis), Québec, Canada. Bien que son père, entrepreneur, soit analphabète, il étudie sous la tutelle des Frères des écoles chrétiennes. De 1854 à 1860, il fait ses études... [Lire la suite]
Sur le jardin et sur la cour,
Un triste vent d'automne court.
Ayant renoncé à l'ivresse,
Au morne labeur je m'empresse.
Comme un fantôme aveugle et sourd
Qui hanterait de vieilles tours,
Je vais au hasard et je tresse
Ce chant de profonde tristesse.
Certes, je tremble dans la brume,
Cependant j'avance et j'assume.
J'avance sans avoir la foi,
J'assume sans trop savoir quoi,
Je sens, que nul ne s'en étonne,
Un peu de douceur dans l'automne.
Animaux des cimes
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Je les vois se dresser auprès d’un sommet vert,
L’isard et l’éléphant, partis loin des bocages ;
Ils ne sont point de ceux que vous mettez en cage,
Ils ont pour domicile un grand bout d’univers.
De verdoyant gazon les monts se sont couverts ;
Les grands boeufs volontiers en feraient leur pacage ;
Et la grenouille brune, au fond des marécages,
En rêve quelquefois, dans son sommeil d’hiver.
Aux cimes d’alentour la brise se lamente ;
À l’horizon lointain s’esquisse une tourmente
Que semblent escorter d’immenses oiseaux gris.
L’été rayonne aussi sur le vieux cimetière
Qui se blottit au pied de la montagne fière
Où d’un sombre corbeau nous entendons le cri.
Arbre des bénédictions
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Lui qui est jeune et souple, il est fait de bois vert,
Il n’est point au jardin, mais près d’un marécage ;
Il voit à l’horizon ses frères du bocage,
Il bénit chaque jour l’auteur de l’univers.
Je l’entends consacrer des animaux divers,
De l’ignoble serpent il maudit les truquages ;
Il purifie le sol où seront les pacages,
Il glorifie l’été, il adoucit l’hiver.
Il console parfois Lilith qui se lamente,
De même, il réconforte Eve qui se tourmente,
Il offre des perchoirs aux petits oiseaux gris.
Cet univers nouveau n’eut pas de cimetière,
Chaque être y conserva sa liberté entière ;
Un livre d’autrefois l’a joliment décrit.