Midi au village
Nul troupeau n’erre ni ne broute ;
Le berger s’allonge à l’écart ;
La poussière dort sur la route,
Le charretier sur le brancard.Le forgeron dort dans la forge ;
Le maçon s’étend sur un banc ;
Le boucher ronfle à pleine gorge,
Les bras rouges encor de sang.La guêpe rôde au bord des jattes ;
Les ramiers couvrent les pignons ;
Et, la gueule entre les deux pattes,
Le dogue a des rêves grognons.Les lavandières babillardes
Se taisent. Non loin du lavoir,
En plein azur, sèchent les hardes
D’une blancheur blessante à voir.La férule à peine surveille
Les écoliers inattentifs ;
Le murmure épars d’une abeille
Se mêle aux alphabets plaintifs…Un vent chaud traîne ses écharpes
Sur les grands blés lourds de sommeil,
Et les mouches se font des harpes
Avec des rayons de soleil.Immobiles devant les portes
Sur la pierre des seuils étroits,
Les aïeules semblent des mortes
Avec leurs quenouilles aux doigts.C’est alors que de la fenêtre
S’entendent, tout en parlant bas,
Plus libres qu’à minuit peut-être,
Les amants, qui ne dorment pas.
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
René-François SULLY PRUDHOMME
René Armand François Prudhomme, dit Sully Prudhomme, né à Paris le 16 mars 1839 et mort à Châtenay-Malabry le 6 septembre 1907, est un poète français, premier lauréat du Prix Nobel de littérature en 1901. Fils d’un commerçant, René Armand Prudhomme, qui souhaite devenir ingénieur, fait ses études au lycée Bonaparte,... [Lire la suite]
Commentaires
Aucun commentaire
Rédiger un commentaire