Matins joyeux
Oh ! les anciens matins de bonheur infini,
De joie inexplicable ! Oh ! les matins tout roses
Où l’on ouvrait son âme à des bonheurs sans causes
Comme à des oiseaux fous qui se trompent de nid.Oh ! les matins pieux dans le mois de Marie !
On imaginait voir, au loin se prolongeant,
Des floraisons d’azur et des ruisseaux d’argent
Faisant de l’avenir une chose fleurie.Parmi des encensoirs, des flambeaux, des gradins,
Souriait la Madone en de naïfs jardins,
Tandis que nous servions la messe en robe rouge.Et nous rêvions alors du jour proche et joyeux
Où nous allions sentir le frôlement qui bouge,
Des premiers lauriers verts dans nos jeunes cheveux !…
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Georges RODENBACH
Georges Rodenbach (né le 16 juillet 1855 à Tournai et mort le 25 décembre 1898 à Paris) était un poète symboliste et un romancier belge de la fin du XIXe siècle. Issu d’une famille bourgeoise d’origine allemande – son père, fonctionnaire au ministère de l’Intérieur, est vérificateur des poids et mesures ;... [Lire la suite]
Valentin sous la terre
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L’amour en inframonde, un désordre infini !
Une chimère adopte un petit cochon rose,
Des corps vont s’unissant pour de futiles causes,
La cigogne rencontre un dahut dans son nid.
Le lourd catoblépas arbore un bikini ;
Le léger colibri sur l’iguane se pose.
Nul arbitre, nul flic à cela ne s’oppose :
Sur ces cas, le juriste est assez démuni.
Les principaux démons siègent sur des gradins,
Contemplant ces ébats dans leur sombre jardin :
-- Il ne fait pas trop froid, notre lave est bien rouge !
Un rhapsode égaré se croit chez Dupanloup ;
-- Monseigneur, est-ce vous ? Votre visage est flou,
Il est mal éclairé, puis, tout le temps, il bouge.
On se mélange comme cela nous arrange ?
Ça fait pas de nous des anges !
Seigneur Triton Volant
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Cet animal gouverne un domaine infini,
Univers parallèle où les soleils sont roses,
Où plaident les trous noirs pour de très nobles causes;
C’est le Triton Volant, de sinople est son nid.
Ses milliards de sujets sont assez désunis ;
Inextricables sont les questions qu’ils se posent,
Nul arbitre, nul juge un verdict n’y oppose,
Et le pouvoir central est plutôt démuni.
Les nombreux insoumis siègent sur leurs gradins,
Sauf ceux qui aiment mieux s’endormir au jardin :
-- Il ne fait pas mauvais, notre ciel est bien rouge !
Le triton, certains jours, aimerait être un loup,
Mais il ne sait pourquoi, le motif en est flou,
L’envie de pourchasser des animaux qui bougent.