Ma sirène
Ma sirène est bleue comme les veines où elle nage
Pour l’instant elle dort sur la nacre
Et sur l’océan que je crée pour elle
Elle peut visiter les grottes magiques des îles saugrenues
Là des oiseaux très bêtes
conversent avec des crocodiles qui n’en finissent plus
Et les oiseaux très bêtes volent au-dessus de la sirène bleue
Les crocodiles retournent à leur boire
Et l’île n’en revient pas
ne revient pas d’où elle se trouve
où ma sirène et moi nous l’avons oubliéeMa sirène a des étoiles très belles dans son ciel
Des étoiles blondes aux yeux noirs
Des étoiles rousses aux dents étincelantes
et des étoiles brunes aux beaux seins
Chaque nuit trois par trois
alternant la couleur de leurs cheveux
Ces étoiles visitent ma sirène
Cela fait beaucoup d’allées et venues dans le ciel
Mais le ciel de ma sirène n’est pas un ciel ordinaireMa sirène a sept bateaux sur son océan
Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi
Samedi et Dimanche
Les uns à vapeur les autres à voiles
Les uns rapides les autres lents
Mais tous beaux mais tous charmants
avec des marins connaissant leur métierMa sirène a des savons de toutes formes et de toutes couleurs
C’est pour laver sa jolie peau
Ma sirène a beaucoup de savons
L’un pour les mains
L’autre pour les pieds
Un pour hier
Un pour demain
Un pour chacun des yeux
Et celui-là pour sa queue d’écailles
Et cet autre pour les cheveux
Et encore un pour son ventre
Et encore un pour ses reinsMa sirène ne chante que pour moi
J’ai beau dire à mes amis de l’écouter
Personne ne l’entendit jamais
Excepté un, un seul
Mais bien qu’il ait l’air sincère
Je me méfie car il peut être menteur.
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Robert DESNOS
Robert Desnos est un poète français, né le 4 juillet 1900 à Paris et mort du typhus le 8 juin 1945 au camp de concentration de Theresienstadt, en Tchécoslovaquie à peine libéré du joug de l’Allemagne nazie. Autodidacte et rêvant de poésie, Robert Desnos est introduit vers 1920 dans les milieux littéraires modernistes et... [Lire la suite]
Robert le triton
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Robert est doux comme un ondin ;
Il est l'amant d'une sirène
Qu'il traite de muse et de reine,
Robert, ce joyeux baladin.
À l'heure où le pluvian rusé
Adresse des propos futiles
À son client, le crocodile,
Robert boit du bon vin rosé.
Ensuite, il offre des étoiles
À la sirène, ainsi qu'un jeu,
Puis encore un monde neigeux,
Puis un navire aux lourdes voiles,
Puis six autres vaisseaux de fer
Et des matelots pleins d'audace ;
Le plus solide, un brise-glace
Qu'assembla jadis Lucifer.
Robert fabrique des savons
Avec des ingrédients magiques ;
Car ce bateleur énergique
A tous les dons, nous le savons.
Cette sirène de Robert
N'est point mentionnée par la presse ;
C'est le fait d'une enchanteresse
D'être invisible, comme l'air.
Cette Dame est un ange
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Sa demeure est là-haut, tout là-haut, dans le ciel,
En un jardin magique où la brise murmure ;
D’un athlétique archange étincelle l’armure,
Le domaine est enclos d’un mur immatériel.
L’invincible guerrier, cousin de Gabriel,
Sent que l’Amour atteint son âme jadis pure ;
Il sait que, cependant, la Dame n’en a cure,
Dont rien ne peut toucher le coeur immatériel.
Il écrit un sonnet qui son malheur expose,
Mais nul ne s’intéresse aux lignes qu’il compose;
Un angelot, pourtant, les orne de dessins.
Qui pourrait émouvoir cette Dame trop sage ?
Un pécheur repenti ? Un démon ? L’Esprit Saint ?
Un grand seigneur, usant de son droit de cuissage ?
Dame d’inframonde
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Mes repas sont réduits à l’essentiel,
Une biscotte, une pomme bien mûre ;
Chaque dimanche, une olive en saumure,
Au Nouvel An, deux tartines de miel.
J’ai dû quitter mon cousin Gabriel,
Car il voulait garder son âme pure ;
De mon tourment, je crois qu’il n’en a cure,
Il est content d’être un ange du ciel.
D’être bannie ne me rend pas morose,
Je me souviens du Prince et de sa rose ;
J’ai ce beau livre et ses jolis dessins.
Cet inframonde est aussi pour les sages,
Car tu sais bien qu’ils ne sont pas des saints
Et qu’il vaut mieux douter de leur message.
Ondin bizarre
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Fils d’une sirène follette,
Je n’aime ps le goût du sel ;
J’aimerais mieux avoir du miel
Ou bien du piment d’Espelette.
Je voudrais être une belette
Et régner sur un archipel ;
Mais la magie manque à l’appel,
Rien de changé dans mon squelette.
Je suis un ondin sans espoir,
Car tous les dieux m’ont laissé choir ;
Au diable cette vie foireuse.
N’écris pas là-dessus, vieux porc ;
Écris sur la sirène heureuse
Qui drague les marins du port.