L’Impassible
La Satiété dort au fond de vos grands yeux ;
En eux, plus de désirs, plus d’amour, plus d’envie ;
Ils ont bu la lumière, ils ont tari la vie,
Comme une mer profonde où s’absorbent les cieux.Sous leur bleu sombre on lit le vaste ennui des Dieux,
Pour qui toute chimère est d’avance assouvie,
Et qui, sachant l’effet dont la cause est suivie,
Mélangent au présent l’avenir déjà vieux.L’infini s’est fondu dans vos larges prunelles,
Et devant ce miroir qui ne réfléchit rien
L’Amour découragé s’assoit, fermant ses ailes.Vous, cependant, avec un calme olympien,
Comme la Mnémosyne à son socle accoudée,
Vous poursuivez, rêveuse, une impossible idée.1866
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Théophile GAUTIER
Pierre Jules Théophile Gautier est un poète, romancier, peintre et critique d’art français, né à Tarbes le 30 août 1811 et mort à Neuilly-sur-Seine le 23 octobre 1872 à 61 ans. Né à Tarbes le 30 août 1811, le tout jeune Théophile garde longtemps « le souvenir des montagnes bleues ». Il a trois ans lorsque sa famille... [Lire la suite]
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Miroir obscur
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Le poète, attiré par un regard charmant,
S'effraie de ne point voir, pourtant, ce qu'il reflète.
Nul éclat, nul désir, nul feu, nulle paillette...
La princesse au boudoir traîne languissamment.
Nul songe ne palpite en ces deux diamants,
Nulle onde ne parcourt leur surface parfaite ;
La belle n'est pas triste, et n'est pas inquiète,
Combien froid, cependant, est son rayonnement !
L'infini n'atteint pas ce beau foyer sans flamme,
Nul reflet ne surgit, dans ce miroir si beau
Qu'on voudrait y sentir la chaleur d'un flambeau.
La belle n'entretient aucun feu dans son âme,
Sibylle savourant un calice idéal
Dont rien ne vient troubler le transparent cristal.