Les Moines
Je vous invoque ici, Moines apostoliques,
Chandeliers d’or, flambeaux de foi, porteurs de feu,
Astres versant le jour aux siècles catholiques,
Constructeurs éblouis de la maison de Dieu ;Solitaires assis sur les montagnes blanches,
Marbres de volonté, de force et de courroux,
Prêcheurs tenant levés vos bras à longues manches
Sur les remords ployés des peuples à genoux ;Vitraux avivés d’aube et de matin candides,
Vases de chasteté ne tarissant jamais,
Miroirs réverbérant comme des lacs lucides
Des rives de douceur et des vallons de paix ;Voyants dont l’âme était la mystique habitante,
Longtemps avant la mort, d’un monde extra-humain,
Torses incendiés de ferveur haletante,
Rocs barbares debout sur l’empire romain ;Étendards embrasés, armures de l’Église,
Abatteurs d’hérésie à larges coups de croix,
Géants chargés d’orgueil que Rome immortalise,
Glaives sacrés pendus sur la tête des rois ;Arches dont le haut cintre arquait sa vastitude,
Avec de lourds piliers d’argent comme soutiens,
Du côté de l’aurore et de la solitude,
D’où sont venus vers nous les grands fleuves chrétiens ;Clairons sonnant le Christ à belles claironnées,
Tocsins battant l’alarme, à mornes glas tombants,
Tours de soleil de loin en loin illuminées,
Qui poussez dans le ciel vos crucifix flambants.
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Commentaires
Rédiger un commentaire
Émile VERHAEREN
Émile Adolphe Gustave Verhaeren, né à Saint-Amand dans la province d’Anvers, Belgique, le 21 mai 1855 et mort à Rouen le 27 novembre 1916, est un poète belge flamand, d’expression française. Dans ses poèmes influencés par le symbolisme, où il pratique le vers libre, sa conscience sociale lui fait évoquer les grandes villes... [Lire la suite]
- J'ai cru à tout jamais notre joie engourdie
- Les Meules qui Brûlent
- Les Vêpres
- Les Saints, les Morts, les Arbres et le Vent
- Sois-nous propice et consolante encor...
- S'il était vrai
- La glycine est fanée et morte est...
- Si d'autres fleurs décorent la maison
- Lorsque ta main confie, un soir...
- L'Ombre est Lustrale et l'Aurore Irisée
Gotlib vous invoqua, vautours apostoliques,
Charbonniers d'or, vautours de foi, vautours de feu,
Chantés par Verhaeren en des vers bucoliques,
Charbonniers éblouis quand vous sortez du pieu ;
Amoureux quelquefois des douces seiches blanches,
Sautant par volupté comme des kangourous,
Soiffards vautours faisant à tout propos la manche
Pour aller à Cluny en bande boire un coup ;
Charbonniers pleins de bière et d'un humour morbide,
Recueils d'obscénité ne tarissant jamais,
Priant Cochonfucius en des couplets stupides
Pour qu'il vous laisse boire et vous foute la paix ;
Quand vous êtes bien pleins, chacun d'entre vous chante,
Debout sur les débris des marcassins humains,
Votre hymne tout vibrant de clameurs haletantes,
Dont le refrain semble être Ils sont fous, ces Romains ;
Charbonniers embrasés, horde qui vocalise,
Tels autant de lemmings des gloses de ces noix,
Charbonniers pleins d'orgueil que Tapioca défrise,
Refusant qu'un Richard puisse être votre roi ;
Monstres dont le délire acquiert sa vastitude
Dans le pinard mystique et fort qui vous soutient,
Quand les licornes n'ont plus que leur gratitude,
Alors vous exultez, nobles vautours freudiens ;
Charbonniers que contriste un goût de marjolaine,
Charbonniers sous les coups du roi Richard tombant,
Vous aurez une endive en cette nuit sereine,
Vous serez à jamais de fiers vautours flambants.