Le Vaisseau d’Or
Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l’or massif :
Ses mâts touchaient l’azur, sur des mers inconnues ;
La Cyprine d’amour, cheveux épars, chairs nues,
S’étalaient à sa proue, au soleil excessif.Mais il vint une nuit frapper le grand écueil
Dans l’Océan trompeur où chantait la Sirène,
Et le naufrage horrible inclina sa carène
Aux profondeurs du Gouffre, immuable cercueil.Ce fut un Vaisseau d’Or, dont les flancs diaphanes
Révélaient des trésors que les marins profanes,
Dégoût, Haine et Névrose, entre eux ont disputés.Que reste-t-il de lui dans la tempête brève ?
Qu’est devenu mon coeur, navire déserté ?
Hélas ! Il a sombré dans l’abîme du Rêve !
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Commentaires
Rédiger un commentaire
Émile NELLIGAN
Émile Nelligan (24 décembre 1879 à Montréal – 18 novembre 1941 à Montréal) est un poète canadien (québécois). Disciple du symbolisme, il a été profondément influencé par Octave Crémazie, Louis Fréchette, Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Georges Rodenbach, Maurice Rollinat et Edgar Allan Poe. Parmi les... [Lire la suite]
Nef du Capitaine Crochet
-------------------
Sur son noble vaisseau, le pirate est pensif,
Il se souvient des mots d’une belle inconnue ;
Son coeur en est troublé, son âme est comme nue,
Ce sentiment l’accable et lui semble excessif.
La nef est en danger de frapper un récif ;
La barre cependant, habilement tenue
Par un homme intrépide et plein de retenue,
Sauve d’un tel destin le navire massif.
Capitaine et barreur, en des plaisirs profanes,
Marins de comédie, héros d’Aristophane,
Vident plusieurs godets, perdant toute fierté.
Que leur apportera leur navigation brève ?
Pourront-ils découvrir un lieu de liberté ?
Il leur reste, sinon, le continent du Rêve.
Captain Hook's pirate ship
-------------------
Aboard his ship, the pirate is dreaming,
Minding the words of an unknown lady;
Dark is his mind, and his soul is shady,
And such a mood he does find unseeming.
Now the hull might get broken on a reef,
But the ship's wheel is held by the right hand
Of the helmsman, a guy so kind and bland,
For the strong ship, this means a true relief.
Man and captain, in ordinary joy,
Drink some red wine served by Helen of Troy,
That is the end of all their former pride.
What do they get from so short a voyage ?
No discovery, just a bit of spoilage;
On wings on dream they continue to ride.
Errance nautique
--------------
Ce bateau dérivant, c’est un vaisseau massif,
C’est un sombre rafiot d’origine inconnue ;
Quelquefois, sur le pont, chante une voix ténue,
J’entends jour après jour son déclin progressif.
Ce surprenant navire ignore les récifs,
Une magie puissante est par lui détenue ;
Les pâles matelots dans leur noire tenue
Arborent presque tous un visage pensif.
Songent-ils à leur vie, qui jadis fut profane ?
Se remémorent-ils des mots d’Aristophane ?
Sur un danger prochain furent-ils alertés ?
Je n’en dirai pas plus dans cette chanson brève,
Je laisse à ces errants leur pleine liberté ;
Ils savent naviguer sur les ailes du Rêve.
Déclin d’Ulysse
--------
Vaisseau vétuste, un peu poussif,
Que pousse une brise menue ;
Une sirène à voix ténue
Chante sans efforts excessifs.
Ce délabrement progressif,
Quelle amère déconvenue !
Brûlants de larmes retenues,
Nous lâchons des soupirs furtifs.
Ainsi notre vigueur se fane ;
Les sbires de l’enfer profanent
Les autels qu’ils ont piratés.
Gravez une épitaphe brève
Sur nos tombeaux déshérités ;
Le temps qui reste, un mauvais rêve.
Ainsi le dit
Un grand conteur,
Homèr’ d’Allaure.
--------------
https://paysdepoesie.wordpress.com/2013/12/15/un-erudit/