Le Temps
Ode
I
Le Temps ne surprend pas le sage ;
Mais du Temps le sage se rit,
Car lui seul en connaît l’usage ;
Des plaisirs que Dieu nous offrit,
Il sait embellir l’existence ;
Il sait sourire à l’espérance,
Quand l’espérance lui sourit.II
Le bonheur n’est pas dans la gloire,
Dans les fers dorés d’une cour,
Dans les transports de la victoire,
Mais dans la lyre et dans l’amour.
Choisissons une jeune amante,
Un luth qui lui plaise et l’enchante ;
Aimons et chantons tour à tour !III
» Illusions ! vaines images ! »
Nous dirons les tristes leçons
De ces mortels prétendus sages
Sur qui l’âge étend ses glaçons ; »
» Le bonheur n’est point sur la terre,
Votre amour n’est qu’une chimère,
Votre lyre n’a que des sons ! »IV
Ah ! préférons cette chimère
A leur froide moralité ;
Fuyons leur voix triste et sévère ;
Si le mal est réalité,
Et si le bonheur est un songe,
Fixons les yeux sur le mensonge,
Pour ne pas voir la vérité.V
Aimons au printemps de la vie,
Afin que d’un noir repentir
L’automne ne soit point suivie ;
Ne cherchons pas dans l’avenir
Le bonheur que Dieu nous dispense ;
Quand nous n’aurons plus l’espérance,
Nous garderons le souvenir.VI
Jouissons de ce temps rapide
Qui laisse après lui des remords,
Si l’amour, dont l’ardeur nous guide,
N’a d’aussi rapides transports :
Profitons de l’adolescence,
Car la coupe de l’existence
Ne pétille que sur ses bords !(1824)
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Gérard de NERVAL
Gérard de Nerval, pseudonyme de Gérard Labrunie, né à Paris le 22 mai 1808 et mort à Paris le 26 janvier 1855, était un poète français. Il passe son enfance dans le Valois, dont les paysages furent source d’inspiration. A Paris, il mène une vie de bohème, fréquente le ‘Cénacle’ de Victor Hugo puis publie une... [Lire la suite]
Cyclochronie
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L’Ouroboros du Temps, qui peut l’apercevoir ?
Quelle réalité recouvre ce symbole ?
Un prophète d’antan l’évoque en paraboles,
Peut-être pour masquer un peu de son savoir.
Ce langage imagé pourrait te décevoir,
Tu pourrais réclamer de plus franches paroles ;
Tu veux savoir comment l’ouroboros s’envole,
Mais répondre à cela n’est pas en mon pouvoir.
Ce monstre peut subir des mutations soudaines,
Gravement progresser ou faire des fredaines,
Qui sait sur quels chemins il voudra s’avancer ?
Son regard est songeur, sa démarche est furtive,
Il est inattentif à notre voix plaintive ;
De lui, je ne sais pas ce que je dois penser.
Danse avec le temps
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Ce qu’on ne peut apercevoir,
Pourquoi l’évoquer en paroles ?
Chacun dit que le temps s’envole,
Pourtant nul ne peut le savoir.
Ce qui ne peut te décevoir,
C’est le chant, c’est la danse folle ;
Ton âme et ton esprit décollent,
Ton coeur aussi, je peux le voir.
Survient une clarté soudaine ;
Loin des contingences mondaines
Tu ne songes qu’à t’élancer.
Dans cette escapade furtive,
Ta muse se fait inventive ;
Ta plume se met à danser.