Le sonneur
Cependant que la cloche éveille sa voix claire
A l’air pur et limpide et profond du matin
Et passe sur l’enfant qui jette pour lui plaire
Un angelus parmi la lavande et le thym,Le sonneur effleuré par l’oiseau qu’il éclaire,
Chevauchant tristement en geignant du latin
Sur la pierre qui tend la corde séculaire,
N’entend descendre à lui qu’un tintement lointain.Je suis cet homme. Hélas ! de la nuit désireuse,
J’ai beau tirer le câble à sonner l’Idéal,
De froids péchés s’ébat un plumage féal,Et la voix ne me vient que par bribes et creuse !
Mais, un jour, fatigué d’avoir enfin tiré,
Ô Satan, j’ôterai la pierre et me pendrai.
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Stéphane MALLARME
Étienne Mallarmé, dit Stéphane Mallarmé, né à Paris le 18 mars 1842 et mort à Valvins (commune de Vulaines-sur-Seine, Seine-et-Marne) le 9 septembre 1898, est un poète français. Auteur d’une œuvre poétique ambitieuse et difficile, Stéphane Mallarmé a été l’initiateur, dans la seconde moitié du XIXe siècle,... [Lire la suite]
Ornithologie hagiographique
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Voici l’oiseau qu’aimait Sainte Marie Pas Claire,
Près d’elle il se posait pour prier, le matin ;
D’ailleurs, il composait des sonnets pour lui plaire
Et pour elle cueillait la lavande et le thym.
Lui qui aimait aussi l’heure crépusculaire,
Il lui a consacré quelques vers, en latin ;
Car il maîtrisait bien les langues séculaires,
Il aimait fréquenter nos ancêtres lointains.
Marie Pas Claire était d’harmonie désireuse ;
Le dieu qu’elle servait s’appelait Idéal,
C’est celui qui naquit au mois de Floréal.
Puis, ils ont plaisanté pendant les heures creuses ;
Un ermite voisin, par leur rire attiré,
Leur offrit tout le vin qu’ils ont pu désirer.
Oiseau du maître Andersen
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Un plumage éclatant se montre en l’aube claire,
Tandis que disparaît l’étoile du matin ;
Le cygne en sa beauté souvent peut se complaire,
Ainsi qu’une élégante en robe de satin.
Cet oiseau ne craint pas l’heure crépusculaire,
Ni le sombre Ponant qui de rouge se teint ;
Du jour et de la nuit le rythme séculaire
Lui semble familier depuis des temps lointains.
Son enfance, dit-il, ne fut point malheureuse,
Même si son profil n’était pas idéal,
Même s’il frissonnait dans le vent boréal.
L’ironie des canards n’est guère douloureuse,
Le cygne n’y trouva pas de quoi soupirer ;
À présent, dit le conte, il en est admiré.
Honneur à la sonnante
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Elle éveille les gens quand survient l’aube claire
Et sait, comme le coq, annoncer le matin ;
Ce vibrant du carillon n’est pas pour nous déplaire,
Nous sortons vivement de nos draps de satin.
La cloche indique aussi le temps crépusculaire,
Si souvent évoqué dans les textes latins ;
De l’horloge elle suit le parcours circulaire
Et sonne aussi le glas quand une vie s’éteint.
Nous aidant à franchir les heures douloureuses,
Accompagnant nos coeurs dans un jour sépulcral,
Elle offre à nos tympans son timbre magistral.
Du coq de ce clocher, serait-elle amoureuse ?
Je ne sais si par elle il se sent attiré,
Je ne crois pas l’avoir entendu soupirer.