Poème 'Le Solitaire' de Pierre de MARBEUF

Le Solitaire

Pierre de MARBEUF

(Extrait)

… Ô plaisirs passagers de notre vanité !
Êtes-vous donc suivis de quelque éternité ?
Éternité de bien, éternité de peine,
Lorsque je pense à toi tu m’assèches la veine :
Ma plume ni mes vers ne peuvent plus couler,
Ma langue s’engourdit, je ne peux plus parler.
Gouffre d’éternité, tu n’as ni fond ni rive,
De la fin de tes jours jamais le jour n’arrive,
Et ce jour éternel qui toujours s’entre-suit,
Aux plus clairs jugements n’est qu’une obscure nuit.
Que si quelqu’un te nomme alors que je t’écoute,
Hélas ! éternité, mon esprit ne voit goutte.
Tous les siècles qu’on peut figurer par les sens,
Les cents de millions, les milliards de cents,
Ne font d’une minute une moindre parcelle,
Si l’on veut les marquer à l’horloge éternelle. …

Poème préféré des membres

Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.

Commentaires

  1. Tour du penseur solitaire
    ----------

    Ce refuge est bâti en un sinistre lieu,
    Souvent l’on y perçoit l’odeur d’un marécage ;
    C’est loin des champs de fleurs et c’est loin des bocages,
    Un scribe l’a choisi pour y devenir vieux.

    Lui qui se complaisait en un juste milieu,
    Dans l’extrême ascétisme on dirait qu’il s’engage ;
    En sa cellule il vit, tel l’oiseau dans sa cage,
    Sans tourner ses regards vers la splendeur des cieux.

    Tu ne le verras plus trinquer avec sa bande
    De joyeux commensaux, c’est terminé pour lui,
    Sa première vigueur n’est plus qu’une légende.

    Il ne craint pourtant pas de sombrer dans l’ennui,
    Car l’invisible muse en cet exil le suit ;
    Toujours cette égérie est de ses mots gourmande.

  2. Errance du penseur solitaire
    --------

    Je trouve reposant d’aller en divers lieux,
    Je fus prédestiné à ces vagabondages ;
    J’allais par les chemins au printemps de mon âge,
    Ce sont deux ou trois rues maintenant ; je suis vieux.

    Je croise des passants, gens de tous les milieux,
    Assez facilement le dialogue s’engage ;
    J’ai même rencontré d’autres bibliophages
    Avec lesquels, d’ailleurs, je m’entendis au mieux.

    Au troquet, partageant les urbaines légendes,
    Nous nous réhydratons, tandis que le temps fuit ;
    De nos plaisanteries la serveuse est friande.

    Nous nous appliquons à la sauver de l’ennui,
    Nous qui par son sourire avons été séduits ;
    Or, cela peut durer, car elle en redemande.

Rédiger un commentaire

© 2024 Un Jour Un Poème - Tous droits réservés
UnJourUnPoeme sur Facebook UnJourUnPoeme sur Twitter RSS