Le récif de corail
Le soleil sous la mer, mystérieuse aurore,
Éclaire la forêt des coraux abyssins
Qui mêle, aux profondeurs de ses tièdes bassins,
La bête épanouie et la vivante flore.Et tout ce que le sel ou l’iode colore,
Mousse, algue chevelue, anémones, oursins,
Couvre de pourpre sombre, en somptueux dessins,
Le fond vermiculé du pâle madrépore.De sa splendide écaille éteignant les émaux,
Un grand poisson navigue à travers les rameaux ;
Dans l’ombre transparente indolemment il rôde ;Et, brusquement, d’un coup de sa nageoire en feu
Il fait, par le cristal morne, immobile et bleu,
Courir un frisson d’or, de nacre et d’émeraude.
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José-Maria de HEREDIA
José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]
L'ondine s'aventure
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L'ondine solitaire est partie à l'aurore ;
Nul ne sait avec quel mystérieux dessein
Elle quitte rivière et cascade et bassin
Pour gagner le sentier à l'étonnante flore.
Le monde des éclats du matin se colore ;
La mousse des sous-bois forme de verts coussins,
L'écorce du platane a d'étranges dessins,
Une racine au sol semble une mandragore.
De sinople et d'argent, tels sont les deux émaux
Dont les arbres, ce jour, ont orné leurs rameaux ;
Mais que leur veut, enfin, la naïade qui rôde ?
À midi, quand du ciel tombe un rayon de feu
Sorti d'on ne sait où, comme issu du ciel bleu,
Survient un jeune troll au regard d'émeraude.
Dieu des chauves-souris
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Ce dieu de peu de poids vole jusqu’à l’aurore ;
Il s’agite beaucoup, mais c’est sans nul dessein,
Il n’entend même pas les conseils de ses saints.
Il goûte le parfum de la nocturne flore.
Quand le bois des éclats du matin se colore,
Le coq retentissant réveille ses poussins ;
Le dieu nocturne trace un étrange dessin
Au-dessus des guérets où dort la mandragore.
La feuille et le plumage ont mêlé leurs émaux
Dans les arbres du parc aux fragiles rameaux ;
Personne, en ce matin, ne voit le dieu qui rôde.
Il craint le grand soleil et ses rayons de feu,
Il ne désire pas voler dans le ciel bleu,
Il veut baigner de nuit son âme d’émeraude.
Navigation lointaine
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Ce navire poursuit d’exotiques aurores,
Aucun de ses marins n’a de sombres desseins ;
Dieu protège la nef, ainsi que tous les saints,
Ceux qui sont officiels et puis ceux du folklore.
L’océan par endroits de gueules se colore,
Mais cela ne vient pas des coups d’un assassin ;
L’équipage, admirant tous ces rouges dessins,
Y croit voir les aspects d’une magique flore.
Les rochers du rivage ont de nobles émaux,
Près d’eux l’on aperçoit d’étranges animaux
Qui regardent la mer et paisiblement rôdent.
Parfois des naufrageurs allument un grand feu,
Croyant que les marins n’y verront que du bleu ;
Cela ne trouble point cette nef en maraude.