Le merle
Un oiseau siffle dans les branches
Et sautille gai, plein d’espoir,
Sur les herbes, de givre blanches,
En bottes jaunes, en frac noir.C’est un merle, chanteur crédule,
Ignorant du calendrier,
Qui rêve soleil, et module
L’hymne d’avril en février.Pourtant il vente, il pleut à verse ;
L’Arve jaunit le Rhône bleu,
Et le salon, tendu de perse,
Tient tous ses hôtes près du feu.Les monts sur l’épaule ont l’hermine,
Comme des magistrats siégeant.
Leur blanc tribunal examine
Un cas d’hiver se prolongeant.Lustrant son aile qu’il essuie,
L’oiseau persiste en sa chanson,
Malgré neige, brouillard et pluie,
Il croit à la jeune saison.Il gronde l’aube paresseuse
De rester au lit si longtemps
Et, gourmandant la fleur frileuse,
Met en demeure le printemps.Il voit le jour derrière l’ombre,
Tel un croyant, dans le saint lieu,
L’autel désert, sous la nef sombre,
Avec sa foi voit toujours Dieu.A la nature il se confie,
Car son instinct pressent la loi.
Qui rit de ta philosophie,
Beau merle, est moins sage que toi !
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Théophile GAUTIER
Pierre Jules Théophile Gautier est un poète, romancier, peintre et critique d’art français, né à Tarbes le 30 août 1811 et mort à Neuilly-sur-Seine le 23 octobre 1872 à 61 ans. Né à Tarbes le 30 août 1811, le tout jeune Théophile garde longtemps « le souvenir des montagnes bleues ». Il a trois ans lorsque sa famille... [Lire la suite]
Arboriculture onirique
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L'arbre a cent soleils dans ses branches ;
Griffons adossés, pleins d'espoir,
Rêvent d'avoir des lunes blanches
Servies à leur repas du soir.
Le hibou vient, au crépuscule,
Croyant qu'on est en février ;
Puis il réfléchit, recalcule
Et consulte un calendrier.
Or, les trois animaux, dans l'ombre,
Voient la lune errer, sous leurs yeux,
Tandis que le vieux soleil sombre
Vers l'inframonde, ou d'autres lieux.
Voir aussi
https://paysdepoesie.wordpress.com/2015/03/04/arboriculture-onirique/