Le Corbeau voulant imiter l’Aigle
L’Oiseau de Jupiter enlevant un mouton,
Un Corbeau témoin de l’affaire,
Et plus faible de reins, mais non pas moins glouton,
En voulut sur l’heure autant faire.
Il tourne à l’entour du troupeau,
Marque entre cent Moutons le plus gras, le plus beau,
Un vrai Mouton de sacrifice :
On l’avait réservé pour la bouche des Dieux.
Gaillard Corbeau disait, en le couvant des yeux :
Je ne sais qui fut ta nourrice ;
Mais ton corps me paraît en merveilleux état :
Tu me serviras de pâture.
Sur l’animal bêlant à ces mots il s’abat.
La Moutonnière créature
Pesait plus qu’un fromage, outre que sa toison
Etait d’une épaisseur extrême,
Et mêlée à peu près de la même façon
Que la barbe de Polyphème.
Elle empêtra si bien les serres du Corbeau
Que le pauvre animal ne put faire retraite.
Le Berger vient, le prend, l’encage bien et beau,
Le donne à ses enfants pour servir d’amusette.
Il faut se mesurer, la conséquence est nette :
Mal prend aux Volereaux de faire les Voleurs.
L’exemple est un dangereux leurre :
Tous les mangeurs de gens ne sont pas grands Seigneurs ;
Où la Guêpe a passé, le Moucheron demeure.
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Jean de La Fontaine, né le 8 juillet 1621 à Château-Thierry, est un poète français de la période classique dont l’histoire littéraire retient essentiellement « les Fables » et dans une moindre mesure les contes licencieux. On lui doit cependant des poèmes divers, des pièces de théâtre et des livrets... [Lire la suite]
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Corvusromulus et Remuscorvus
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Chacun des deux voudrait gouverner l’étendue
Qui va depuis la mer jusqu’aux vastes plateaux ;
Les voici s’affrontant, par temps froid, par temps chaud,
En des imprécations par le peuple entendues ;
Chacun des deux voudrait des armes inconnues,
Afin de l’emporter, sur la terre ou sur l’eau ;
Les peintres en feraient de merveilleux tableaux
Avec leurs gros pinceaux et leurs brosses menues.
Aucun des deux, pourtant, n’est pour l’autre un danger,
Ne sachant point combattre, ils ne font que songer
Et la paix se maintient, sans gloire, sans surprise.
Leurs courageux soldats, on les trouve au comptoir,
Qui boivent lentement dans la fraîcheur du soir,
C’est la spécialité qu’ils ont vraiment apprise.