Poème 'Le clair de lune' de Aloysius BERTRAND dans 'Gaspard de la nuit'

Le clair de lune

Aloysius BERTRAND
Recueil : "Gaspard de la nuit"

Oh ! qu’il est doux, quand l’heure tremble au clocher,
la nuit, de regarder la lune qui a le nez fait comme
un carolus d’or !

Deux ladres se lamentaient sous ma fenêtre, un chien
hurlait dans le carrefour, et le grillon de mon foyer
vaticinait tout bas.

Mais bientôt mon oreille n’interrogea plus qu’un silence
profond. Les lépreux étaient rentrés dans leurs chenils,
aux coups de Jacquemart qui battait sa femme.

Le chien avait enfilé une venelle, devant les pertuisanes
du guet enrouillé par la pluie et morfondu par la bise.

Et le grillon s’était endormi, dès que la dernière bluette
avait éteint sa dernière lueur dans la cendre de la cheminée.

Et moi, il me semblait, – tant la fièvre est incohérente ! -
que la lune, grimant sa face, me tirait la langue comme
un pendu !

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Commentaires

  1. Minuit chez vous
    -----------------

    La lune au ciel fait la grimace
    À tous les voyageurs qui passent :
    Car elle préfère les nuits
    Où sur un désert elle luit.

    Le grillon sommeille en la cendre
    En rêvant à son amie tendre ;
    Il n’ôte point son habit noir
    Pour s’endormir, quand vient le soir.

    Le chien guide les argousins
    Car il croît être leur cousin,
    Précédant leur troupe légère
    Tout au long des trottoirs lunaires.

    On n’entend plus le Jacquemart,
    Il est caché dans son plumard ;
    Et pour une épouse qu’il aime,
    Il a composé ce poème.

  2. Chien sous la lune
    ----------

    Marchant sous un nuage et sous la lune basse,
    J’entends autour de moi les rumeurs de la nuit ;
    L’étoile du Berger devers le Ponant luit,
    Je savoure à loisir le goût du temps qui passe.

    Nuage et lune sont des êtres peu loquaces,
    Je découvre une piste et, pour voir, je la suis ;
    Car c’est souvent ainsi que j’échappe à l’ennui,
    Mais je n’attrape rien, n’étant point un rapace.

    Qui dira les beautés de ce trottoir lunaire ?
    Je ne saurais trouver de meilleur luminaire,
    La surface éclairée devient une oeuvre d’art.

    Aloysius m’observe en prenant quelques notes,
    Je lui lèche la main, c’est un de mes vieux potes,
    C’est un faiseur de vers, ce n’est pas un soudard.

  3. Obscur et clair
    -----

    Il chante, cet oiseau de nuit,
    Quand sous ses yeux la lune luit,
    Car il n'est pas encore adulte,
    Il a l'avenir devant lui.

  4. Bertrand A. un reve mon bisaieul le claire de lune

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Aloysius BERTRAND

Portait de Aloysius BERTRAND

Louis Jacques Napoléon Bertrand, dit Aloysius Bertrand est un poète, dramaturge et journaliste français, né le 20 avril 1807 à Ceva (Piémont), mort le 29 avril 1841, à dix heures du matin, à l’hôpital Necker de Paris. Considéré comme l’inventeur du poème en prose, il est notamment l’auteur d’une œuvre... [Lire la suite]

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