Le château de l’espérance
Ta pâle chevelure ondoie
Parmi les parfums de ta peau
Comme folâtre un blanc drapeau
Dont la soie au soleil blondoie.Las de battre dans les sanglots
L’air d’un tambour que l’eau défonce,
Mon coeur à son passé renonce
Et, déroulant ta tresse en flots,Marche à l’assaut, monte, – ou roule ivre
Par des marais de sang, afin
De planter ce drapeau d’or fin
Sur ce sombre château de cuivre- Où, larmoyant de nonchaloir,
L’Espérance rebrousse et lisse
Sans qu’un astre pâle jaillisse
La Nuit noire comme un chat noir.
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Stéphane MALLARME
Étienne Mallarmé, dit Stéphane Mallarmé, né à Paris le 18 mars 1842 et mort à Valvins (commune de Vulaines-sur-Seine, Seine-et-Marne) le 9 septembre 1898, est un poète français. Auteur d’une œuvre poétique ambitieuse et difficile, Stéphane Mallarmé a été l’initiateur, dans la seconde moitié du XIXe siècle,... [Lire la suite]
De gueules à un crocodile d'or
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Sous la forte chaleur, le ciel ondoie,
Loin de la savane et de ses troupeaux,
Sur la rouge enseigne du grand tripot,
À un crocodile d'or, qui blondoie.
On ne le voit pas versant des sanglots,
Ni tel un plongeur qui dans l'eau s'enfonce ;
Bestiole héraldique à manger renonce,
Ainsi qu'à la douce fraîcheur des flots.
Mais ça lui va bien, ce grand nonchaloir,
L'immobilité d'une armure lisse,
Heureux qu'à côté de lui s'établisse
Messire pluvian, son faire-valoir.
Château perdu
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Un escargot son château doit laisser,
Je ne sais pas si c’est ce qu’il désire ;
Il a prévu de parcourir l’Empire,
Ce sera long, mais il n’est pas pressé.
Il combattra ceux qui l’ont offensé,
C’est sa promesse, il ne peut s’en dédire :
Noir est l’exil, le déshonneur est pire.
Il dit adieu à tout son cher passé.
Cet escargot ne craint pas les épreuves,
De la potion des Gaulois il s’abreuve,
Donnant l’assaut et poussant des clameurs.
Un dieu vaillant conduit sa destinée ;
Nous admirons cette bête obstinée
Dont le courage au grand jamais ne meurt.
Tribunal du château
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Le Maître du Château s’efforce à l’équité ;
Au riche il est sévère, au pauvre il est propice.
Au barde il fait savoir que le mot de « justice »
Doit à certains moments rimer avec « bonté ».
Ceux qui comme témoins en ce lieu sont cités
Savent qu’ils n’en auront jamais de préjudice ;
Car ce noble seigneur, dont les dieux sont complices,
Saura les respecter, dans sa simplicité.
Cela fonctionne ainsi, avec ou sans les dieux,
Des hommes, la sagesse est présente en ce lieu,
Cette Cour ne saurait être un Conseil de Guerre.
Un prince précéda le Maître aux cheveux gris
Par qui furent la charge et le flambeau repris ;
S’il était juste ou non, je ne m’en souviens guère.
Caillou qui vient de l’espace
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Les diables ont du ciel un roc précipité,
Pour cela choisissant la nuit la plus propice ;
Était-ce un bon présage, était-ce un maléfice ?
L’abbé sur ce mystère a longtemps médité.
Par nul évangéliste un tel fait n’est cité,
Ni par aucun décret venant du Saint Office ;
Les moines ont choisi d’en tirer bénéfice,
Chose qu’ils font souvent, dans leur simplicité.
Disant que ce bolide était un don de Dieu,
Le peuple construisit une église en ce lieu,
Faite pour abriter cette magique pierre.
Cent mille voyageurs du caillou sont épris,
Qui le trajet pédestre ont en choeur entrepris ;
J’aurai toujours un mot pour eux dans mes prières.