La vie qu’elles me font mener
Pas moi, despotiques Vénus .
Offrant sur fond d’or le Lotus
Du Mal, coiffées à la Titus!
Pas moi, Circées
Aux yeux en grand deuil violet comme des pensées!
Pas moi, binious
Des Papesses des blancs Champs-Élysées des fous,
Qui vous relayez de musiques
Par le calvaire de techniques
Des sacrilèges domestiques!Le mal m’est trop! tant que l’Amour
S’échange par le temps qui court
Simple et sans foi comme un bonjour,
Des jamais franches
À celles dont le Sort vient le poing sur la hanche,
Et que s’éteint
La Rosace du Temple, à voir, dans le satin,
Ces sexes livrés à la grosse
Courir, en valsant, vers la Fosse
Commune des Modernes Noces.Ô Rosace! leurs charmants yeux
C’est des vains cadrans d’émail bleu
Qui marquent l’heure que l’on veut,
Non des pétales,
De ton Soleil des Basiliques Nuptiales!
Au premier mot,
Peut-être (on est si distinguée à fleur de peau!)
Elles vont tomber en syncope
Avec des regards d’antilope; -
Mais tout leur être est interlope !Tu veux pas fleurir fraternel ?
C’est bon, on te prendra tel quel,
Petit mammifère usuel !
Même la blague
Me chaut peu de te passer au doigt une bague.
- Oh! quel grand deuil,
Pourtant! leur ferait voir leur frère d’un autre œil!
Voir un égal d’amour en l’homme
Et non une bête de somme
Là pour lui remuer des sommes !Quoi ? vais-je prendre un air géant,
Et faire appeler le Néant?
Non, non; ce n’est pas bienséant.
Je me promène
Parmi les sommités des colonies humaines;
Du bout du doigt
Je feuillette les versions de l’Unique Loi,
Et je vivotte, et m’inocule
Les grands airs gris du crépuscule,
Et j’en garule ! et j’en garule !
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Jules LAFORGUE
Jules Laforgue, né à Montevideo le 16 août 1860 et mort à Paris le 20 août 1887, est un poète du mouvement décadent français. Né dans une famille qui avait émigré en espérant faire fortune, il est le deuxième de onze enfants. À l’âge de dix ans, il est envoyé en France, dans la ville de Tarbes d’où est originaire... [Lire la suite]
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