La ronce et le serpent
Foisonnantes, couvant des venins séculaires
Dans ce marécageux semis d’herbe et de rocs,
Les ronces, par fouillis épais comme des blocs,
Embusquaient sourdement leurs dards triangulaires.Ah certe ! Elles guettaient si bien l’occasion
Du Mal, si scélérate épiait leur adresse,
Que l’accrochant éclair de leurs griffes traîtresses
Fut plus subtil encor que ma précaution.J’enrageais ! Quand mon pied heurte un serpent… la bête
Aurait pu se venger ? elle écarta la tête,
Et s’enfuit d’un train plus rampant.Allons ! que ton humeur à présent se défronce,
Me dis-je ! – Et, j’oubliai pour un si doux serpent
La méchanceté de la ronce.
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Maurice ROLLINAT
Maurice Rollinat, né à Châteauroux (Indre) le 29 décembre 1846 et mort à Ivry-sur-Seine le 26 octobre 1903, est un poète français. Son père, François Rollinat, était député de l’Indre à l’Assemblée constituante en 1848 et fut un grand ami de George Sand. Issu d’un milieu cultivé, Rollinat se met très... [Lire la suite]
Un serpent n'est jamais brutal comme une ronce,
Des blonds cheveux d'un prince il vient à s'émouvoir ;
Et s'il le fait mourir, dans un désert, le soir,
C'est pour tuer le deuil où son âme s'enfonce.
Amphisbène édénique
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L’amphisbène au printemps, joyau de la nature,
Se prélasse dans l’arbre et chante sous les cieux,
Célébrant la grandeur et la gloire de Dieu,
Et puis il se repose au sein de la verdure.
Son corps est bariolé comme une enluminure,
C’est un vivant trésor, un plaisir pour les yeux ;
Il se sait le Phénix des hôtes de ces lieux,
Et du fruit de cet arbre il fait sa nourriture.
La Dame du Jardin le salue en passant,
Il prend, à l’observer, un plaisir innocent.
Il ne sait d’ailleurs pas s’il est jaloux de l’Homme.
Si la femme voulait partager son repas,
Elle pourrait aimer la saveur de la pomme ;
Qu’importe si ce fruit procure le trépas ?
Noblesse d"un serpent
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Qui donc croira que l’homme est roi de la nature ?
Il ne domine pas la terre ni les cieux ;
Il prétend qu’on l’a fait à l’image de Dieu,
Je dis, foi de serpent, que c’est une imposture.
Il cultive la prose et les enluminures,
Ce n’est, le plus souvent, que de la poudre aux yeux ;
Il se croit le Seigneur des vivants de ces lieux,
De ses sujets parfois faisant sa nourriture.
Primate, calme-toi, car tu n’es qu’un passant,
Sans mes explications tu serais innocent,
C’est de moi que provient la noblesse de l’homme.
Savoureuse devient la fin de ton repas
Car tu peux désormais mordre dans une pomme,
Ce fruit que, semble-t-il, tu ne connaissais pas.