La réponse du crucifix
En expirant sur l’arbre affreux du Golgotha,
De quel regret ton âme, ô Christ, fut-elle pleine ?
Était-ce de laisser Marie et Madeleine
Et les autres, au roc où la Croix se planta ?Quand le funèbre chœur sans Toi se lamenta,
Et que les clous crispaient tes mains; quand, par la plaine,Ton âme eût dispersé la fleur de son haleine,
Devançant ton essor vers le céleste Etat;Quel fut ce grand soupir de tristesse infinie
Qui s’exhala de toi lorsque, l’œuvre finie,
Tu t’apprêtais enfin à regagner le But ?Me dévoileras-tu cet intime mystère ?
-Ce fut de ne pouvoir, jeune homme, le fiel bu,
Serrer contre mon cœur mes bourreaux sur la Terre !
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Émile NELLIGAN
Émile Nelligan (24 décembre 1879 à Montréal – 18 novembre 1941 à Montréal) est un poète canadien (québécois). Disciple du symbolisme, il a été profondément influencé par Octave Crémazie, Louis Fréchette, Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Georges Rodenbach, Maurice Rollinat et Edgar Allan Poe. Parmi les... [Lire la suite]
L’arbre songe à la croix
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L’arbre qui dans l’Eden dépeuplé subsista
Se mit à méditer quand la lune fut pleine ;
Venant d’on ne sait où, par une nuit sereine,
Une révélation soudain le visita.
Les mots d’un charpentier, que l’écho répéta,
Séduisirent son coeur, comme une cantilène ;
Il vit aussi pleurer la Vierge Souveraine
Quand dans ce corps humain le métal se planta.
Il vit que la nation, de ce jardin bannie,
Recevait le pardon comme une épiphanie,
L’instrument du supplice étant son tendre bois.
Car les arbres, souvent, comprennent les mystères,
Le pain du dernier jour, le calice que boit
Avec ses compagnons le Sauveur de la Terre.
Modestie d’un arbre
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— Arbre, toi qui es fier et droit,
Veux-tu devenir notre roi?
— Je reconnais un seul monarque,
C’est Notre Seigneur sur sa croix.