La Nymphe Alceste
Tu es née, à minuit, du baiser de deux sources,
Alceste, et l’univers ne t’offre que reflets,
Lueurs, lampe allumée au lointain, feux follets
Et dans le ciel les sept flambeaux de la Grande Ourse.Il fait noir et, partant au signal de la course,
Tu ne soupçonnes pas que la nuit se soumet
Et se dissout quand le soleil, sur les sommets,
Par le chant des oiseaux répand l’or de sa bourse.Je sais que reviendront l’aurore et le matin.
Je les ai vus, tu les verras, j’en suis certain.
Déjà mon cœur se gonfle au rythme de leur danse.Mais saurai-je à ta sœur qui doit naître en plein jour,
Nymphe Alceste, annoncer, dès midi, le retour
Du crépuscule, de la nuit et du silence.
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Robert DESNOS
Robert Desnos est un poète français, né le 4 juillet 1900 à Paris et mort du typhus le 8 juin 1945 au camp de concentration de Theresienstadt, en Tchécoslovaquie à peine libéré du joug de l’Allemagne nazie. Autodidacte et rêvant de poésie, Robert Desnos est introduit vers 1920 dans les milieux littéraires modernistes et... [Lire la suite]
Lyre de lion
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Musique incomparable, où prend-elle sa source ?
De l'harmonie céleste, elle semble un reflet ;
Qui fait sonner la lyre ? Serait-ce un troll follet
Cherchant, par ces accords, à charmer la Grande Ourse ?
Au travers du cosmos, les sons prennent leur course,
Au curieux musicien, la lyre se soumet,
Et son inspiration culmine en un sommet ;
Harpagon, s'il passait, lui jetterait sa bourse.
Ce virtuose est là, dès le petit matin,
Je crois que c'est un lion, j'en suis même certain,
Sur le bel instrument, ses lourdes griffes dansent.
Il fera résonner la lyre tout un jour,
Et quand viendra pour lui le moment du retour
Au désert taciturne... Ah, quel heureux silence !
Coureurs de fond
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Préparant leur départ, ils boivent l'eau des sources,
Mais sans prendre le temps d'admirer leur reflet ;
Le parcours est tracé, la troupe est au complet,
Suivez votre chemin, coureurs pleins de ressources.
Les animaux des bois sont témoins de la course,
C'est un événement qu'ils ne ratent jamais ;
Les uns dans les vallons, d'autres sur les sommets,
Le faon avec la biche et l'ourson avec l'ourse.
Le grillon vespéral, l'araignée du matin,
Nul ne manque, aujourd'hui, nous en sommes certains,
Des spectateurs la foule est notablement dense.
Le rude marathon durera tout un jour ;
Les vigoureux coureurs, chaque année de retour,
Nomment cet épisode un devoir de vacances.
Lion céleste
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Quel animal ! Il est beau comme un ange,
Mais comme un homme il sent battre son coeur ;
À Cupidon, qui de lui fut vainqueur,
Il n’en veut point, cela n’a rien d’étrange.
Le temps s’avance, et son visage change,
Mais il vieillit sans perdre sa vigueur ;
Les ans pour lui n’ont pas trop de rigueur,
Lui, cependant, avec l’âge, il se range.
Quant à ses fils, ils sont grands, ces petits,
Pour les plaisirs ils sont pleins d’appétit ;
Par ces enfants sa grandeur se prolonge.
Ils parlent à leur père bien-aimé,
Ils ont appris les mots qu’il fait rimer ;
Quelquefois, même, ils l’entendent en songe.