La meunière
La meunière, une forte et rougeaude jeunesse,
Chantait dans sa charrette en piquant son bardeau ;
Tout à coup, l’animal quittant son pas lourdaud,
Partit brusque ! il venait de sentir une ânesse.Celle-ci, l’ayant vu du fond du brouillard pâle,
D’un long cri de désir hélait le bourriquot
Lequel hâtait sa course en ébranlant l’écho
D’un grand hi-han tout plein de sa vigueur de mâle.Jointe, ce fut l’éclair ! Entre ses pieds roidis
Il lui serra les flancs et l’eut toute ! Et, tandis
Qu’allaient se consommant ces amours bucoliques,Renversée en arrière, avec un oeil fripon,
La meunière, à deux mains rabattant son jupon,
Riait, jambes en l’air sur les limons obliques.
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Maurice ROLLINAT
Maurice Rollinat, né à Châteauroux (Indre) le 29 décembre 1846 et mort à Ivry-sur-Seine le 26 octobre 1903, est un poète français. Son père, François Rollinat, était député de l’Indre à l’Assemblée constituante en 1848 et fut un grand ami de George Sand. Issu d’un milieu cultivé, Rollinat se met très... [Lire la suite]
Cet érudit, dans sa jeunesse,
Pouvait porter de grands fardeaux.
Mais il était un peu lourdaud,
Il a bien gagné en finesse.
*
Son âme, maintenant plus pâle,
Prend des traits un peu monacaux,
Sa parole crée moins d'écho,
Mais ce n'est pas pour ça qu'il râle.
*
Car son esprit n'est pas roidi,
Son talent n'est pas refroidi,
Son chant est toujours bucolique.
*
Il ne va plus, tel un fripon,
Soulevant les chastes jupons,
Mais il jette un regard oblique.