La Fuite
KADIDJA.
Au firmament sans étoile,
La lune éteint ses rayons ;
La nuit nous prête son voile.
Fuyons ! fuyons !AHMED.
Ne crains-tu pas la colère
De tes frères insolents,
Le désespoir de ton père,
De ton père aux sourcils blancs ?KADIDJA.
Que m’importent mépris, blâme,
Dangers, malédictions !
C’est dans toi que vit mon âme.
Fuyons ! fuyons !AHMED.
Le cœur me manque ; je tremble,
Et, dans mon sein traversé,
De leur kandjar il me semble
Sentir le contact glacé !KADIDJA.
Née au désert, ma cavale
Sur les blés, dans les sillons,
Volerait, des vents rivale.
Fuyons ! fuyons !AHMED.
Au désert infranchissable,
Sans parasol pour jeter
Un peu d’ombre sur le sable,
Sans tente pour m’abriter…KADIDJA.
Mes cils te feront de l’ombre ;
Et, la nuit, nous dormirons
Sous mes cheveux, tente sombre.
Fuyons ! fuyons !AHMED.
Si le mirage illusoire
Nous cachait le vrai chemin,
Sans vivres, sans eau pour boire,
Tous deux nous mourrions demain.KADIDJA.
Sous le bonheur mon cœur ploie ;
Si l’eau manque aux stations,
Bois les larmes de ma joie.
Fuyons ! fuyons !1845
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Théophile GAUTIER
Pierre Jules Théophile Gautier est un poète, romancier, peintre et critique d’art français, né à Tarbes le 30 août 1811 et mort à Neuilly-sur-Seine le 23 octobre 1872 à 61 ans. Né à Tarbes le 30 août 1811, le tout jeune Théophile garde longtemps « le souvenir des montagnes bleues ». Il a trois ans lorsque sa famille... [Lire la suite]
Les amoureux marchent pieds nus
Au printemps dans une herbe tendre,
Entourés de sons inconnus
Qu'ils ont seuls à pouvoir entendre.
*
Avant que le soir fût venu
Ils ont trouvé de quoi s'étendre ;
Les gestes longtemps retenus
Sont accomplis sans plus attendre.
*
Au lointain dorment les villages,
Nul paysan au pâturage,
Nul promeneur sur le chemin.
*
A l'horizon dort la montagne.
Dorment compagnon et compagne
Ici, sans penser à demain.