L’olive
I
je ne quiers pas la fameuse couronne,
Saint ornement du Dieu au chef doré,
Ou que, du Dieu aux Indes adoré,
Le gai chapeau la tête m’environne.
Encores moins veux je que l’on me donne
Le mol rameau en Cypre décoré
Celui qui est d’Athènes honoré,
Seul je le veux, et le Ciel me l’ordonne.
O tige heureux, que la sage Déesse
En sa tutelle et garde a voulu prendre,
Pour faire honneur à son sacré autel
Orne mon chef, donne moi hardiesse
De te chanter, qui espère te rendre
Égal un jour au Laurier immortel.II
Loire fameux, qui, ta petite source,
Enfles de maints gros fleuves et ruisseaux,
Et qui de loin coules tes claires eaux
En l’Océan d’une assez vive course
Ton chef royal hardiment bien haut pousse
Et apparais entre tous les plus beaux,
Comme un taureau sur les menus troupeaux,
Quoi que le Pô envieux s’en courrouce.
Commande doncq’ aux gentilles Naïades
Sortir dehors leurs beaux palais humides
Avecques toi, leur fleuve paternel,
Pour saluer de joyeuses aubades
Celle qui t’a, et tes filles liquides,
Deifié de ce bruit éternel.III
Divin Ronsard, qui de l’arc à sept cordes
Tiras premier au but de la mémoire
Les traits ailés de la Française gloire,
Que sur ton luth hautement tu accordes.
Fameux harpeur et prince de nos odes,
Laisse ton Loir hautain de ta victoire,
Et viens sonner au rivage de Loire
De tes chansons les plus nouvelles modes.
Enfonce l’arc du vieil Thébain archer,
Ou nul que toi ne sut onq’ encocher
Des doctes Sueurs les sagettes divines.
Porte pour moi, parmi le ciel des Gaules,
Le saint honneur des nymphes Angevines,
Trop pesant faix pour mes faibles épaules.IV
Si notre vie est moins qu’une journée
En l’éternel, si l’an qui fait le tour
Chasse nos jours sans espoir de retour,
Si périssable est toute chose née,
Que songes tu, mon âme emprisonnée ?
Pourquoi te plaît l’obscur de notre jour,
Si pour voler en un plus clair séjour,
Tu as au dos l’aile bien empennée ?
Là, est le bien que tout esprit désire,
Là, le repos où tout le monde aspire,
Là, est l’amour, là, le plaisir encore.
Là, ô mon âme, au plus haut ciel guidée,
Tu y pourras reconnaître l’Idée
De la beauté, qu’en ce monde j’adore.
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Commentaires
Rédiger un commentaire
Joachim DU BELLAY
Joachim du Bellay est un poète français né vers 1522 à Liré en Anjou, et mort le 1er janvier 1560 à Paris. Sa rencontre avec Pierre de Ronsard fut à l’origine de la formation de la « Pléiade », groupe de poètes auquel Du Bellay donna son manifeste, « la Défense et illustration de la langue... [Lire la suite]
- Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau...
- Ces cheveux d’or sont les liens Madame
- La nuit m’est courte, et le jour trop me...
- Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome
- D'un vanneur de blé aux vents
- Déjà la nuit en son parc amassait
- Ces cheveux d’or, ce front de marbre
- Seigneur, je ne saurais regarder d'un bon...
- France, mère des arts, des armes et des lois
- J'aime la liberté, et languis en service
- Ne pense pas, Bouju, que les nymphes latines
- Que dirons-nous, Melin, de cette cour romaine
- De quelque autre sujet que j'écrive, Jodelle
- Je ne suis pas de ceux qui robent la louange
- Je ne découvre ici les mystères sacrés
- Doulcin, quand quelquefois je vois ces...
- Plus riche assez que ne se montrait celle
- Comme un qui veut curer quelque cloaque...
- En mille crespillons les cheveux se friser
- Si onques de pitié ton âme fut atteinte
- Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau... (14)
- Comme jadis l'ame de l'univers (9)
- Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome (7)
- Encore que l'on eût heureusement compris (7)
- Astres cruels, et vous dieux inhumains (7)
- Seigneur, je ne saurais regarder d'un bon... (6)
- Celle qui de son chef les étoiles passait (6)
- C'était ores, c'était qu'à moi je devais... (6)
- Sire, celui qui est a formé toute essence (5)
- Ô beaux cheveux d'argent mignonnement retors (5)
IV bis
Saint Idolastre
-----------------
Étrange saint, qui toute la journée
Invoque dieu et diable tour à tour ;
Puis une idole aux séduisants contours
Qu’en un blason cet homme a dessinée.
Or, la déesse, ainsi emprisonnée,
Change la nuit en un magique jour ;
De l’idolastre est plaisant le séjour
En sa cellule assez bien ordonnée.
Il prie toujours, ça comble ses désirs,
Avec des mots pas plus forts qu’un soupir ;
Il se repose, et puis il prie encore.
Par qui son coeur est-il ainsi guidé ?
Par qui ses mots seront-ils validés ?
Peut-être par l’entité qu’il adore.