Poème 'L’estoc' de José-Maria de HEREDIA dans 'Les Trophées'

L’estoc

José-Maria de HEREDIA
Recueil : "Les Trophées"

Au pommeau de l’épée on lit : Calixte Pape.
La tiare, les clefs, la barque et le tramail
Blasonnent, en reliefs d’un somptueux travail,
Le Boeuf héréditaire armoyé sur la chappe.

A la fusée, un Dieu païen, Faune ou Priape,
Rit, engainé d’un lierre à graines de corail ;
Et l’éclat du métal s’exalte sous l’émail
Si clair, que l’estoc brille encor plus qu’il ne frappe.

Maître Antonio Perez de Las Cellas forgea
Ce bâton pastoral pour le premier Borja,
Comme s’il pressentait sa fameuse lignée ;

Et ce glaive dit mieux qu’Arioste ou Sannazar,
Par l’acier de sa lame et l’or de sa poignée,
Le pontife Alexandre et le prince César.

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Commentaires

  1. Armoiries quenaldiennes :
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    En haut du bouclier, on lit : Raymond, satrape.
    La pointe est de sinople, incomparable émail ;
    On n'y voit point la plume, outil de son travail,
    Mais un oiseau d'azur et, de sable, deux grappes.

    On aurait pu y mettre, au naturel, Priape ;
    Le sang de la sirène et son coeur de corail ;
    Le fils du charpentier dans l'éclat d'un vitrail
    Ou Félix Dupanloup dans sa papale cape ;

    Mais rien de tout cela dans l'écu que forgea
    L'armurier du Collège, en un temps où déjà
    Était passé de mode un trop foisonnant thème.

    Tu aurais pu, buvant le vin de ton tonneau,
    Tracer sur cet écu, ô mon seigneur Queneau,
    Dix puissance quatorze admirables poèmes.

  2. Pape-lion de gueules
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    Ce rouge seigneur Lion fut choisi comme pape,
    Son écu fut d’argent, le plus modeste émail ;
    Pour que le Règne advienne, il aura du travail,
    Il sera secondé par de nobles satrapes.

    Va-t-il perdre son goût pour les jeux de Priape ?
    Un rouge coeur pourtant palpite en son poitrail,
    Pourrait-il décevoir les dames du sérail ?
    Le Père Dupanloup doit en rire sous cape.

    Aux intrigues de cour son esprit se forgea,
    Les gens du Vatican le remarquent déjà ;
    Un amusant sonnet fut écrit sur ce thème.

    Il ne néglige pas le vin de ses tonneaux,
    Ni sa méditation sur les mots de Queneau ;
    Qu’il soit le pape ou non, sa vie est un poème.

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José-Maria de HEREDIA

Portait de José-Maria de HEREDIA

José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]

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