Keepsake
Sa robe était de tulle avec des roses pâles,
Et rose pâle était sa lèvre, et ses yeux froids,
Froids et bleus comme l’eau qui rêve au fond des bois.
La mer Tyrrhénienne aux langueurs amicales.Berçait sa vie éparse en suaves pétales.
Très douce elle mourait, ses petits pieds en croix ;
Et, quand elle chantait, le cristal de sa voix
Faisait saigner au coeur ses blessures natales.Toujours à son poing maigre un bracelet de fer,
Où son nom de blancheur était gravé « Stéphane »,
Semblait l’anneau rivé de l’exil très amer.Dans un parfum d’héliotrope diaphane
Elle mourait, fixant les voiles sur la mer,
Elle mourait parmi l’automne… vers l’hiver…Et c’était comme une musique qui se fane…
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Commentaires
Rédiger un commentaire
Albert SAMAIN
Albert Samain, né à Lille le 3 avril 1858, mort à Magny-les-Hameaux le 18 août 1900, est un poète symboliste français. Son père étant décédé alors qu’il n’avait que 14 ans, il dut interrompre ses études pour gagner sa vie et devint employé de commerce. Vers 1880, il fut envoyé à Paris, où il décida de rester.... [Lire la suite]
Les sept vagabondes
------------------
Une vierge d’argent éclaire le soir pâle ;
Une ondine d’azur le rend un peu plus froid.
De gueules va dansant la dame en ces grands bois,
Toutes trois se disant des phrases amicales.
Une vierge de sable effeuille les pétales
D’une rose cueillie aux abords d’une croix ;
Une fée de sinople appelle de sa voix
Les démons familiers de sa contrée natale.
Une dame d’hermine a vu, vêtu de fer,
Parsifal que jadis faillit chanter Stéphane
Mallarmé, vieillissant, en des couplets amers.
Toutes sont déjà loin, fuyant le rude hiver ;
Sur la lourde trirème, elles ont pris la mer,
Au rivage laissant leurs pantoufles diaphanes.
Fleur à cinq pétales
-----------------
Tout au fond de la friche est la fleur vespérale,
Elle goûte l’azur et ne craint pas le froid ;
Son ancêtre poussait peut-être au fond des bois
Ou près de l’ancien temple où furent les vestales.
Un bourdon matinal frôle ses cinq pétales,
Puis part au cimetière où sont les blanches croix ;
Un oiseau sans souci fait entendre sa voix,
C’est pour dire un refrain de sa terre natale.
La fleur entend la cloche en son tintement clair
Appelant les passants loin des choses profanes ;
Ce jour est un peu gris, mais il n’est pas amer.
Un arbre dénudé se souvient de l’hiver ;
Une mouette joyeuse est venue de la mer
Pour voir la friche avant que la fleur ne se fane.