Juillet 80
Juillet 80. Cher Théo,
Ces cinquante francs que tu m’envoies
M’éviteront bien des fléaux,
Et m’invitent à parler de moi.
Tu peux -si tu le juges bon-
Penser avec lassitude
Qu’à vingt-sept ans mes abandons
D’un fainéant sont l’habitude.
En français j’ai voulu t’écrire
Qu’ailleurs se trouve mon fardeau,
Que je me ronge au lieu d’agir.
L’outil qui manque, sans cesse me faut,
Dedans moi-même je suis muré,
Anxieux, toujours guettant mes pas,
Recherchant pour les éviter,
Les obstacles à mon résultat.
On ne saurait pas toujours dire
Ce qui enserre ou qui emmure,
On sent autour de soi saillir
Des barreaux, des grilles, des serrures.
Tel a un grand foyer dans l’âme
Et nul ne s’y vient réchauffer,
Les passants n’en voient pas la flamme
Mais juste un filet de fumée.
A quoi donc vais-je enfin servir ?
Tout ce qui souffre en moi, c’est quoi ?
Sur cette terre, que dois-je guérir ?
Je sens, tellement de bon en moi !
Pourtant, comme un compagnonnage,
J’avais cru voir une lueur,
Mes sermons dans le Borinage
En grève ont déplu aux pasteurs.
Voyageant en souliers, couchant
Dans des meules ou sous des rondins
L’hiver, aux matins pers et blancs,
Je voyage avec mes dessins.
Aujourd’hui je te serre la main
Et sache enfin qu’en m’écrivant
Plus qu’argent tu me fais du bien.
Cher Théo, Bien à toi. Vincent
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EricChaudre
Nom : Chaudré
Prénom : Eric
Naissance : 14/10/1950
Présentation : non renseigné
Bienvenue Eric ! Avec ce texte on croirait tenir cette lettre entre nos mains.