Jean des Tilles
- » Ma bague ! ma bague ! » – Et le cri de la lavandière
effraya dans la souche d’un saule un rat qui filait sa
quenouille.Encore un tour de Jean des Tilles, l’ondin malicieux et
espiègle qui ruisselle, se plaint et rit sous les coups
redoublés du battoir !Comme s’il ne lui suffisait pas de cueillir, aux épais
massifs de la rive les nèfles mûres qu’il noie dans le
courant.- » Jean le voleur ! Jean qui pêche et qui sera pêché !
Petit Jean friture que j’ensevelirai, blanc d’un linceul
de farine, dans l’huile enflammée de la poêle ! »Mais alors des corbeaux qui se balançaient à la verte
flèche des peupliers, croassèrent dans le ciel moite et
pluvieux.Et les lavandières, troussées comme des piqueurs d’ablettes,
enjambèrent le gué jonché de cailloux, d’écume, d’herbes
et de glaïeuls.
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Aloysius BERTRAND
Louis Jacques Napoléon Bertrand, dit Aloysius Bertrand est un poète, dramaturge et journaliste français, né le 20 avril 1807 à Ceva (Piémont), mort le 29 avril 1841, à dix heures du matin, à l’hôpital Necker de Paris. Considéré comme l’inventeur du poème en prose, il est notamment l’auteur d’une œuvre... [Lire la suite]
Les ondins et le rat
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Le rat craint les ondins, il lâche sa quenouille
Pour se placer sous la protection des corbeaux ;
Il leur dit qu’il les aime et qu’il les trouve beaux,
Mais pour eux, ce rongeur n’est rien qu’une fripouille.
Les lavandières, quand Jean l’Ondin fait l’andouille,
Prononcent des jurons, délaissant leurs travaux ;
Elle l’appellent plouc, Seigneur des Caniveaux,
Abruti de première et Minable Pedzouille.
Traité de tous les noms, l’ondin ne fait qu’en rire ;
Si l’une d’elles crie qu’elle le fera frire,
« À poêle » est sa réponse, il est un peu moqueur.
Guère aimé des corbeaux, maudit par les commères,
Il n’a point de soupirs ni de larmes amères,
Désinvolte est son âme et paisible son coeur.