Je fu en fleur ou temps passé d’enfance
Je fu en fleur ou temps passé d’enfance
Et puis après devins fruit en jeunesse ;
Lors m’abaty de l’arbre de plaisance,
vert et non meur*, Folie ma maistresse.
Et pour cela Raison, qui tout redresse
A son plaisir, sans tort ou mesprison**,
M’a a bon droit, par sa tresgrant sagesse.
Mis pour meurir ou feurre de prison***.En ce j’ay fait longue continuance,
Sans estre mis a l’essor de largesse ;
J’en suy contant et tiens que, sans doubtance,
C’est pour le mieulx, combien que par peresse
Deviens fletry et tire vers vieillesse.
Assez estaint est en moy le tison
De sot desir, puis qu’ay esté en presse****
Mis pour meurir ou feurre de prison.Dieu nous doint paix, car c’est ma desirance !
Adonc seray en l’eaue de liesse
Tost refreschi et, au souleil de France,
Bien nettié du moisy de tristesse.
J’attens bon temps, endurant en humblesse,
Car j’ay espoir que Dieu ma guerison
Ordonnera ; pource m’a sa haultesse
Mis pour meurir ou feurre de prison.ENVOI
Fruit suis d’yver qui a meins de tendresse
Que fruit d’esté ; si suis en garnison
Pour amolir ma trop verde duresse,
Mis pour meurir ou feurre de prison.(*) mûr
(**) injustice
(***) pour mûrir sur la paille de la prison
(****) enfermé
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Charles d'ORLEANS
Charles d’Orléans, né à Paris le 24 novembre 1394 et mort à Amboise le 5 janvier 1465, duc d’Orléans, est un prince français, connu surtout pour son œuvre poétique réalisée lors de sa longue captivité anglaise. Il est le fils de Louis Ier, duc d’Orléans, frère du roi de France Charles VI, et de Valentine Visconti... [Lire la suite]
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Vieux porc amoureux
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Ce cochon n’a jamais perdu sa convoitise,
Pour une blanche mouette on le voit soupirer ;
Lui qui, devenu vieux, ne craint pas d’endurer
Les multiples tourments dont souffre une âme éprise
Cet innocent vieillard en jeune se se déguise,
Mais personne ne croit qu’on puisse l’admirer ;
Il n’a plus ce qu’il faut pour être désiré,
Car nul vivant ne peut rajeunir à sa guise.
L’Univers a son plan, la Nature a ses lois,
Aussi tu ne dois pas faire n’importe quoi,
Que tu sois l’éléphant, le phoque ou l’hirondelle.
Mais Cupidon poursuit ceux qu’un jour il frappa ;
Le corps est fatigué, l’esprit ne mollit pas,
À ses anciens désirs il veut être fidèle.
***
De l'amour sénile,
Qui peut tirer des poèmes ?
Un vieillard,sans doute.