Je finirai ma vie à l’armée du salut
Je finirai ma vie à l’Armée du Salut.
Depuis bientôt vingt ans je connais la péniche,
Je la voyais souvent quand j’étais presque riche,
Près du Pont d’Austerlitz où je n’habite plus.
J’avais un vieil ami, loup au Jardin des Plantes,
Il est mort, il y a deux ans, on se suivra de peu
Car bien qu’en rigolant je glisse sur la pente.
Au ciel, on s’en ira chasser les cons, nous deux.Je finirai ma vie entre quatre guignols
Qu’on aura mis dehors à la porte d’un bouge,
Qui n’auront plus de quoi s’offrir un verr’ de rouge,
Un tout petit manteau peut-être chez Borniol.
En récapitulant tous les pots qu’on a bus
On se récitera un peu d’Appolinaire
Un peu pour se fair’mal, un peu pour se distraire,
Avant d’aller dormir à l’Armée du Salut.Il sera trois ou quatre ou cinq heur’ du matin,
Le jour se lèvera sur le Jardin des Plantes,
Ma femme, c’est certain, ne sera pas contente,
Mais j’aurai trop de mal à lâcher mes copains.
Sur le bord de la Seine j’irai poser mon cul,
Oubliant quarante ans de vie sans importance,
À jamais fatigué de dir’ce que je pense,
Je finirai ma vie à l’Armée du Salut.Et j’y découvrirai sous de vieux oripeaux
Lacenaire et Landru, Roméo et Juliette,
Deux ou trois m’as-tu-vu qui s’étaient crus poètes
et qui n’ont jamais eu que du vent dans la peau,
Trois hommes sans collier pour quatre chiens perdus,
Un cabot sans théâtre, un avocat sans cause,
Mais pour eux je serai peut-être quelque chose,
Alors en arrivant je leur dirai : « Salut! »
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Bernard DIMEY
Bernard Dimey, né Bernard Georges Lucide Dimey le 16 juillet 1931 à Nogent-en-Bassigny (aujourd’hui Nogent) (Haute-Marne) et mort le 1er juillet 1981 à Paris, est un poète, auteur de chansons et dialoguiste français. Il commence à faire de la radio, puis écrit dans la revue Esprit. Il s’intéresse à la peinture (il a... [Lire la suite]
Toi qui aimais chanter un peu loin du troupeau,
Parfois pour toi tout seul, parfois pour ta Juliette,
Bernard, gargantuesque et merveilleux poète,
Je sais que tu avais tes chansons dans la peau.
Je répète après toi tes mots d'enfant perdu,
Je reprends tes refrains, tes rimes et tes causes,
Car pour moi ton travail, tu sais, c'est quelque chose !
Je pense à toi, Bernard, et je te dis : « Salut ! ».
Chouette, Cochonfucius!
Je ne sais qui vous êtes Cochonfucius, mais pour moi vous êtes un poète (Je n'ajoute pas de qualificatif à ce nom, car on est poète (il y en a, vous en êtes) ou on ne l'est pas. Ce qui est le cas de beaucoup qui le pensent et l'affirment mais n'ont rien d'un Verlaine, Rimbaud, Baudelaire ou Dimey. Qui, eux, me font rêver et me poussent à écrire. Mais en cachette tant que je ne serai pas sûr d'être moi aussi, poète autrement que dans le secret de mon coeur