Poème 'J’aimais autrefois la forme païenne…' de Théophile GAUTIER dans 'Poésies nouvelles et inédites'

Accueil > Les poètes > Poèmes et biographie de Théophile GAUTIER > J’aimais autrefois la forme païenne…

J’aimais autrefois la forme païenne…

Théophile GAUTIER
Recueil : "Poésies nouvelles et inédites"

J’aimais autrefois la forme païenne ;
Je m’étais créé, fou d’antiquité,
Un blanc idéal de marbre sculpté
D’hétaïre grecque ou milésienne.

Maintenant j’adore une Italienne,
Un type accompli de modernité,
Qui met des gilets, fume et prend du thé,
Et qu’on croit Anglaise ou Parisienne.

L’amour de mon marbre a fait un pastel,
Les yeux blancs ont pris des tons de turquoise,
La lèvre a rougi comme une framboise ;

Et mon rêve grec, dans l’or d’un cartel,
Ressemble aux portraits de rose et de plâtre
Où la Rosalba met sa fleur bleuâtre.

1870

Poème préféré des membres

Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.

Commentaires

  1. Jardin pour les trépassés
    --------------------

    Près de l'église, ils se tiennent
    Au port de sérénité,
    Les morts de notre cité,
    Dont les tombes sont anciennes.

    Loin des foules parisiennes,
    Par de hauts murs abrités,
    C'est là qu'ils vont habiter
    Pour les décennies qui viennent.

    Entre les dalles, la brise
    Fait danser les tiges grises
    D'un herbage citadin.

    Pour ceux qui n'ont point de larmes,
    Cet endroit n'est pas sans charmes :
    Avant tout, c'est un jardin.

  2. Raisins au jardin du renard
    ----------------------------

    Ce sont les raisins des fêtes sauvages,
    Les raisins des dieux de l’antiquité ;
    Les garde un petit Priape sculpté,
    Qui sait conjurer d’oiseaux les ravages.

    En tirera-t-on quelque fort breuvage,
    Cet aimable vin de fraternité ?
    J’en connais aussi qui prennent du thé,
    La Garonne en a peu sur ses rivages.

    Les raisins ont pris des tons de turquoise,
    L’insecte leur trouve un goût de framboise ;
    En juger devra Bacchus immortel.

    Il n’en boira point, ce Priape en plâtre,
    Mais trinqueront bien le maître et le pâtre,
    Le sommelier, même, ou soi-disant tel.

  3. Houx d’azur
    ------------

    C’est le houx d’azur, un buisson sauvage,
    Et c’était un dieu dans l’antiquité ;
    Sa tige est d’un bois qu’on ne peut sculpter,
    Qui sait conjurer du vent les ravages.

    On n’en tirera pas un fort breuvage,
    Aucune potion de fraternité ;
    C’est du houx d’azur, ce n’est pas du thé,
    Ni du chocolat des lointains rivages.

    D’autres font pousser du houx de turquoise,
    Ou bien son cousin, porteur de framboises ;
    Mais le houx d’azur plaît aux immortels.

    J’en ai couronné ma Vénus en plâtre,
    Celle qui jadis séduisit un pâtre,
    Fils du houx d’azur, ou soi-disant tel.

  4. Aux abords du trou noir
    ----------

    C’est, dans le cosmos, un trou noir sauvage
    Déjà bien connu dans l’antiquité ;
    Un corps qui l’atteint ne le peut quitter,
    Sur sa trajectoire il fait des ravages.

    Il mange toujours, sans peur du gavage,
    Car c’est un glouton pour l’éternité ;
    Les astres qu’il a laissés subsister
    Sous sa dépendance, ils sont en servage.

    Planète d’azur, lune de turquoise,
    Où je croyais voir pousser des framboises ;
    Mais un tel décor n’est pas immortel.

    Ils tournent pourtant, tous ces corps folâtres,
    Sans craindre la faim du monstre noirâtre ;
    Leurs prêtres lui ont dressé des autels.

Rédiger un commentaire

© 2024 Un Jour Un Poème - Tous droits réservés
UnJourUnPoeme sur Facebook UnJourUnPoeme sur Twitter RSS