Poème 'Hortorum Deus (III)' de José-Maria de HEREDIA dans 'Les Trophées'

Hortorum Deus (III)

José-Maria de HEREDIA
Recueil : "Les Trophées"

Ecce villicus Venit…
CATULLE.

Holà, maudits enfants ! Gare au piège, à la trappe,
Au chien ! Je ne veux plus, moi qui garde ce lieu,
Qu’on vienne, sous couleur d’y quérir un caïeu
D’ail, piller mes fruitiers et grappiller ma grappe.

D’ailleurs, là-bas, du fond des chaumes qu’il étrape,
Le colon vous épie, et, s’il vient, par mon pieu !
Vos reins sauront alors tout ce que pèse un Dieu
De bois dur emmanché d’un bras d’homme qui frappe.

Vite, prenez la sente à gauche, suivez-la
Jusqu’au bout de la haie où croît ce hêtre, et là
Profitez de l’avis qu’on vous glisse à l’oreille :

Un négligent Priape habite au clos voisin ;
D’ici, vous pouvez voir les piliers de sa treille
Où sous l’ombre du pampre a rougi le raisin.

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Commentaires

  1. De gueules aux remparts d’argent
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    Des remparts, mais aussi des grillages, des trappes,
    Il est bien défendu, ce redoutable lieu !
    En fortifications, Vauban ne fit pas mieux,
    Cet endroit n’est pourtant qu’un palais de satrape.

    Le maître de ce bourg se prend-il pour un pape ?
    Il ne prie pourtant pas, il traîne dans son pieu,
    Content de s’en remettre à la grâce de Dieu,
    Lequel lui garantit de plaisantes agapes.

    Quelques vins capiteux arrosent les bons plats
    Dans la salle à manger qu’illumine l’éclat
    Des lustres de cristal, véritables merveilles ;

    C’est dimanche, aujourd’hui, je reçois mes voisins,
    Ceux qui ont récolté des tonnes de raisin
    Dont nous boirons, ce jour, le nectar en bouteilles.

  2. Chauve-souris verte
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    Elle surgit au ciel comme par une trappe,
    Est-ce d’un inframonde, ou d’un tout autre lieu ?
    Je dis «de nulle part», mais c’est faute de mieux,
    J’entends au firmament son rire de satrape.

    Est-ce un démon d’enfer, est-ce un oiseau du Pape ?
    Est-ce un vampire noir que l’on perce d’un pieu ?
    Un ange de sinople, un envoyé de Dieu ?
    De moustiques du soir elle fait ses agapes.

    Elle ne prend jamais de nos bons petits plats
    Et se tient à l’écart du lumineux éclat
    Des lustres du salon, qui point ne l’émerveillent ;

    Elle salue pourtant le hibou, son voisin,
    Et s’approche avec lui des grappes de raisin
    Près desquelles, parfois, aucun gardien ne veille.

  3. Quark tordu
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    Le démon de Maxwell ayant ouvert sa trappe,
    Un quark tordu survient, issu d’un autre lieu ;
    Il est inoffensif, et pour nous c’est tant mieux,
    Il n’a point le coeur dur ni l’âme d’un satrape.

    Son lointain bisaïeul fut béni par le Pape,
    Lui qui le méritait autant qu’un lepton pieux ;
    Les quarks sont, comme nous, créatures de Dieu,
    Et leur âme prend part aux célestes agapes.

    Le démon de Maxwell, lisant son écran plat,
    Interprète un signal au lumineux éclat
    Dont quelques physiciens avec lui s’émerveillent ;

    Puis il part saluer le gluon, son voisin,
    Qui toute la saison, en guise de raisins,
    Presse les neutrinos sur lesquels Bacchus veille.

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José-Maria de HEREDIA

Portait de José-Maria de HEREDIA

José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]

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