Hortorum Deus (I)
Olim truncus eram ficulnus.
HORACE.A Paul Arène.
N’approche pas ! Va-t’en ! Passe au large, Étranger !
Insidieux pillard, tu voudrais, j’imagine,
Dérober les raisins, l’olive ou l’aubergine
Que le soleil mûrit à l’ombre du verger ?J’y veille. A coups de serpe, autrefois, un berger
M’a taillé dans le tronc d’un dur figuier d’Égine ;
Ris du sculpteur, Passant, mais songe à l’origine
De Priape, et qu’il peut rudement se venger.Jadis, cher aux marins, sur un bec de galère
Je me dressais, vermeil, joyeux de la colère
Écumante ou du rire éblouissant des flots ;A présent, vil gardien de fruits et de salades,
Contre les maraudeurs je défends cet enclos…
Et je ne verrai plus les riantes Cyclades.
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José-Maria de HEREDIA
José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]
Cheval dans l’azur
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Je rêve tous les jours d’horizons étrangers,
De chemins fantasmés, de prés que j’imagine,
De juments qui seraient d’adorables frangines
Et de routes passant au milieu des vergers.
Les moutons vont au loin, guidés par leur berger,
Les porcs au potager savourent l’aubergine,
Mais moi, je dois rester à mon lieu d’origine,
Mon maître est casanier, je ne dois pas bouger.
Or, si j’étais un chien, surveillant des galères,
Les océans feraient naviguer ma colère ;
Je tracerais ma route à la faveur des flots.
Rien ne sert de songer à partir en balade,
Je suis sans mouvement, comme un cheval de jade,
Comme un dieu statufié, protégeant cet enclos.
Les démons se font termites
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Dans la charpente, rien ne leur est étranger,
Ils connaissent le bois ; le reste, ils l'imaginent.
Tous enfants de la reine,ou frangins, ou frangines,
Vers le coeur des rondins je les vois converger.
Des termites-soldats leur servent de bergers ;
Mais ils n'ont pas de duc, ni de roi misogyne,
Chacun d'entre eux se dit de modeste origine,
En parfaite harmonie je les entends bouger.
Ils craignent vivement la lumière solaire ;
De voir une fourmi, ça les met en colère ;
Ils adorent nourrir un jeune à peine éclos.
Ces hôtes dans la chair des poutres se baladent
Sans aucun appétit pour l'ardoise ou le jade,
Et tout au long du jour construisent leur enclos.