Hiéroglyphes
Ô pourpiers de mon frère, pourpiers d’or, fleur d’Anhour,
Mon corps en joie frissonne quand tu m’as fait l’amour,
Puis je m’endors paisible au pied des tournesols.
Je veux resplendir telle que les flèches de Hor :
Viens, le kupi embaume les secrets de mon corps,
Le hesteb teint mes ongles, mes yeux ont le kohol.
Ô maître de mon coeur, qu’elle est belle, mon heure !
C’est de l’éternité quand ton baiser m’effleure,
Mon coeur, mon coeur s’élève, ah ! si haut qu’il s’envole.
Armoises de mon frère, ô floraisons sanglantes,
Viens, je suis l’Amm où croît toute plante odorante,
La vue de ton amour me rend trois fois plus belle.
Je suis le champ royal où ta faveur moissonne,
Viens vers les acacias, vers les palmiers d’Ammonn;
Je veux t’aimer à l’ombre bleue de leurs flabelles.
Je veux encore t’aimer sous les yeux roux de Phrâ
Et boire les délices du vin pur de ta voix,
Car ta voix rafraîchit et grise comme Elel.Ô marjolaines de mon frère, ô marjolaines,
Quand ta main comme un oiseau sacré se promène
En mon jardin paré de lys et de sesnis,
Quand tu manges le miel doré de mes mamelles,
Quand ta bouche bourdonne ainsi qu’un vol d’abeilles
Et se pose et se tait sur mon ventre fleuri,
Ah! je meurs, je m’en vais, je m’effuse en tes bras,
Comme une source vive pleine de nymphéas,
Armoises, marjolaines, pourpiers, fleurs de ma vie !
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Remy de GOURMONT
Remy de Gourmont, né au manoir de la Motte à Bazoches-au-Houlme, près d’Argentan (Orne), le 4 avril 1858 et mort à Paris le 27 septembre 1915, est un écrivain français, à la fois romancier, poète, journaliste et critique d’art, proche des symbolistes. Remy de Gourmont est issu d’une ancienne famille originaire... [Lire la suite]
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