Poème 'Heures sereines' de Charles CROS dans 'Le coffret de santal'

Heures sereines

Charles CROS
Recueil : "Le coffret de santal"

A Victor Meunier

J’ai pénétré bien des mystères
Dont les humains sont ébahis:
Grimoires de tous les pays,
Etres et lois élémentaires.

Les mots morts, les nombres austères
Laissaient mes espoirs engourdis;
L’amour m’ouvrit ses paradis
Et l’étreinte de ses panthères.

Le pouvoir magique à mes mains
Se dérobe encore. Aux jasmins
Les chardons ont mêlé leurs haines.

Je n’en pleure pas ; car le Beau
Que je rêve, avant le tombeau,
M’aura fait des heures sereines.

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Commentaires

  1. L’intérieur du reflet
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    Le miroir reflète un mystère,
    Le monarque en reste ébahi :
    Lui qui règne sur des pays
    Craint ce prodige élémentaire.

    Le miroir montre un monde austère
    Où les vivants sont engourdis ;
    On n’y voit pas le paradis,
    Mais pourtant c’est une autre Terre.

    Le cadre qu’on tient d’une main
    Contient l’infini des chemins,
    Un peu d’amour, un peu de haine,

    Plusieurs renards, quelques corbeaux,
    Des chapelles et des tombeaux,
    Une mer, avec des sirènes.

  2. Oiseau du Précurseur
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    « Dans le désert sont les mystères »
    Se disait le diable ébahi ;
    Il n’est pas maître en ce pays,
    Ce magicien rudimentaire.

    Compagne du prophète austère,
    Colombe à l’esprit dégourdi,
    Ouvriras-tu le paradis
    Aux habitants de cette Terre ?

    Celui qui te tient sur sa main
    Peut nous en montrer le chemin,
    L’ermite Jean, l’homme sans haine.

    Avec ton ami le corbeau,
    Tu nous délivres du tombeau,
    Colombe à la voix de sirène.

  3. Oiseau d’apocalypse
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    La colombe explique un mystère
    À Jean par le doute envahi ;
    Lui dont l’esprit fut ébahi
    Reçoit la clarté salutaire.

    Cet apôtre au profil austère
    Ne mange rien le vendredi ;
    Sa nourriture en Paradis
    Meilleure sera que sur Terre.

    Il nourrit l’oiseau de sa main,
    Et lui parle du genre humain
    Ou de Lilith, l’étrange reine.

    Un ange porteur d’un flambeau
    Viendra pour ouvrir les tombeaux
    Et vaincre la Mort souveraine.

  4. Planète Diracandra
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    Sur cet astre, pas de mystère,
    Pas d’impénétrables taillis ;
    Mais rien que de charmants pays,
    Autant de nouvelles Cythères.

    Aucun habitant n’est austère,
    Même, ils sont plutôt dégourdis ;
    Aucun besoin de Paradis
    Car ils l’ont sur leur propre Terre.

    C’est très tentant pour les humains,
    Mais nous ignorons le chemin ;
    Puis cette zone est trop lointaine.

    Seuls y sont allés trois corbeaux,
    Là-bas morts et mis au tombeau ;
    Et leur fin, dit-on, fut sereine.

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