Grand opéra
Ier Acte (Vêpres).
Dors sous le tabernacle, ô Figure de cire !
Triple Châsse vierge et martyre,
Derrière un verre, sous le plomb,
Et dans les siècles des siècles… … Comme c’est long !Portes-tu ton cœur d’or sur ta robe lamée,
Ton âme veille-t-elle en la lampe allumée ?…Elle est éteinte
Cette huile sainte…
Il est éteint
Le sacristain !…L’orgue sacré, ses flots et ses bruits de rafale
Sous les voûtes, font-ils frissonner ton front pâle ?…Dans ton éternité sais-tu la barbarie
De mon orgue infernal, orgue de Barbarie ?Du prêtre, sous l’autel, n’ouïs-tu pas les pas
Et le mot qu’à l’Hostie il murmure tout bas ?…– Eh bien ! moi j’attendrai que sur ton oreiller,
La trompette de Dieu vienne te réveiller !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Châsse, ne sais-tu pas qu’en passant ta chapelle,
De par le Pape, tout fidèle,
Évêque, publicain ou lépreux, a le droit
De t’entr’ouvrir sa plaie et d’en toucher ton doigt ?…
À Saint-Jacques de Compostelle
J’en ai bien fait autant pour un bout de chandelle.À ce prix-là je dois baiser la blanche hostie
Qui scelle, sur ta bouche en or, ta chasteté
Close en odeur de sainteté
. . . . . . . . . . . . . . . . . .
Cordieu ! Madame est donc sortie ?…IIe Acte (Sabbat).
Je suis un bon ange, ô bel Ange !
Pour te couvrir, doux gardien…
La terre maudite me tient.
Ma plume a trempé dans la fange…Hâ ! je ne bats plus que d’une aile !…
Prions… l’esprit du Diable est prompt…
– Ah ! si j’étais lui, de quel bond
Je serais sur toi, la Donzelle !… Ma blanche couronne à ma tête
Déjà s’effeuille ; la tempête
Dans mes mains a brisé mon lys…– Par Belzébuth ! contre la borne
Je viens de me rompre la corne !
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Comme les trucs sont démolis !IIIe Acte (Sereno).
Holà !… je vois poindre un fanal oblique
– Flamberge au vent, joli Muguet !
Sangre Dios ! rossons le guet !…Un bonhomme mélancolique
Chante : – Bonsoir Señor, Señor Caballero,
Sereno… – Sereno toi-même !
– Minuit : second jour de carême,
Prêtez-moi donc un cigaro…Gracia ! La Vierge vous garde !
– La Vierge ?… grand merci, vieux ! Je sens la moutarde !…
– Par Saint-Joseph ! Señor, que faites-vous ici ? –
– Mais… pas grand’chose et toi, merci.– C’est pour votre plaisir ?… – Je damne les alcades
De Tolose au Guadalété !
– Il est un violon, là-bas sous les arcades…
– Ça : n’as-tu jamais arrêté
Musset… musset pour sérénade ?– Santos !… non, sur la promenade,
Je n’ai jamais vu de mussets…
– Son page était en embuscade…
– Ah Carambah ! Monsieur est un señor Français
Qui vient nous la faire à l’aubade ?…
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Tristan CORBIERE
Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière, né le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar à Morlaix (Finistère) et mort le 1er mars 1875 à Morlaix, est un poète français. Il est né de l’union d’Édouard Corbière et d’Angélique Aspasie Puyo que 33 ans séparent : à sa naissance, son père est âgé de... [Lire la suite]
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