Complainte propitiatoire à l’Inconscient
Ô loi, qui êtes parce que vous êtes,
Que votre nom soit la retraite !-Elles ! ramper vers elles d’adoration ?
Ou que sur leur misère humaine je me vautre ?
Elle m’aime, infiniment ! Non, d’occasion !
Si non moi, ce serait infiniment un autre !Que votre inconsciente Volonté
Soit faite dans l’Éternité !-Dans l’orgue qui par déchirements se châtie.
Croupir, des étés, sous les vitraux, en langueur;
Mourir d’un attouchement de l’Eucharistie,
S’entrer un crucifix maigre et nu dans le coeur ?Que de votre communion nous vienne
Notre sagesse quotidienne !-Ô croisés de mon sang ! Transporter les cités !
Bénir la Pâque universelle, sans salaires !
Mourir sur la Montagne, et que l’Humanité,
Aux âges d’or sans fin, me porte en scapulaires !Pardonnez-nous nos offenses, nos cris,
Comme étant d’à jamais écrits !-Crucifier l’infini dans des toiles comme
Un mouchoir, et qu’on dise: « Oh ! L’idéal s’est tu ! »
Formuler tout ! En fugues sans fin dire l’Homme !
Être l’âme des arts à zones que veux-tu !Non, rien ; délivrez-nous de la pensée,
Lèpre originelle, ivresse insensée,Radeau du mal et de l’exil;
Ainsi soit-il.
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Jules LAFORGUE
Jules Laforgue, né à Montevideo le 16 août 1860 et mort à Paris le 20 août 1887, est un poète du mouvement décadent français. Né dans une famille qui avait émigré en espérant faire fortune, il est le deuxième de onze enfants. À l’âge de dix ans, il est envoyé en France, dans la ville de Tarbes d’où est originaire... [Lire la suite]
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Cette complainte est une reproche à l´Inconscient cosmique d´avoir créé le monde et son organisation par des lois inéluctables au lieu de se contenter du Néant. La création fut une grave faute de la Volonté aveugle de l´Inconscient et c´est à l´humanité d´en souffrir et finalement se perdre.