Chant éthiopien
A Emile Wroblewski
Apportez-moi des fleurs odorantes,
Pour me parer, compagnes errantes,
Pour te charmer, ô mon bien-aimé.
Déjà le vent s’élève embaumé.Le vent du soir fait flotter vos pagnes.
Dans vos cheveux, pourquoi, mes compagnes,
Entrelacer ces perles de lait?
Mon cou – dit-il – sans perles lui plaît.Mon cou qu’il prend entre ses bras souples
Frémit d’amour. Nous voyons par couples,
Tout près de nous, entre les roseaux,
Dans le muguet, jouer les oiseaux.Le blanc muguet fait des perles blanches.
Mon bien-aimé rattache à mes hanches
Mon pagne orné de muguet en fleur;
Mes dents – dit-il – en ont la pâleur.Mes blanches dents et mon sein qui cède
Mes longs cheveux, lui seul les possède.
Depuis le soir où son oeil m’a lui,
Il est à moi; moi je suis à lui.
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Charles CROS
Charles Cros, né à Fabrezan (Aude) le 1er octobre 1842, originaire d’une famille de Lagrasse (Aude) et mort à Paris le 9 août 1888, est un poète et inventeur français. Passionné de littérature et de sciences, il fut un temps, de 1860 à 1863, professeur de chimie à l’Institut parisien des Sourds-Muets, avant de se... [Lire la suite]
Apportez du bon vin à la table de Maître,
Il faut boire aujourd’hui, chers compagnons errants,
En l’honneur de ce bel avril exubérant,
En l’honneur du printemps qui se décide à naître.
Le vent léger fait battre au port les grandes voiles,
Et danser les rideaux aux chambres du palais.
Buvez, mes compagnons, tout autant qu’il vous plaît :
Le vent léger vous charme en vos abris de toile.
Les danseuses viendront vous prendre en leurs bras souples,
Du satyre on entend la flûte de roseau
À laquelle répond la phrase d’un oiseau ;
Au soleil nous irons nous allonger par couples.
Aujourd’hui, n’allez pas noircir des pages blanches,
Scribes dont le visage a la même pâleur :
Aujourd’hui, c’est le temps d’errer parmi les fleurs,
D’écouter des chansons, de caresser des hanches.
Hors du moment présent, votre coeur ne possède
Presque rien en ce monde, aussi, cueillez le fruit
Qui s’offre devant vous, cueillez l’instant qui fuit,
Le regard qui se mouille et la lèvre qui cède.